MÉMOIRE POUR L’ATTESTATION UNIVERSITAIRE D’ÉTUDES COMPLÉMENTAIRES DE SEXOLOGIE
Adultes haut potentiel et rapport au corps : quel impact sur la sexualité ?
- Guillemette Stevens – Décembre 2017
Jury :
Docteur Francis Collier
Docteur Patrick Leuillet
Directeur de mémoire :
Docteur Francis Collier
Résumé
Le haut potentiel intellectuel est étudié depuis plusieurs décennies. Si sa définition commence à être claire, son accompagnement de plus en plus présent dans le cadre scolaire, professionnel, voire thérapeutique, son impact sur le corps et la sexualité demeure peu exploré.
Une sexualité épanouie nécessite un minimum de lâcher-prise et d’abandon à l’autre et à l’instant. Il semble donc logique de s’interroger sur l’impact que pourrait avoir notamment une cérébralité exacerbée, une intellectualisation à outrance, sur la Santé Sexuelle.
Ce travail vise ainsi à vérifier, chez des individus étiquetés « haut potentiel », la présence d’une intellectualisation envahissante, de marques d’un rapport au corps potentiellement conflictuel et d’éventuelles dysfonctions sexuelles.
En cas de lien de cause à effet, est-il possible et nécessaire de proposer un accompagnement thérapeutique spécifique ?
Mots-clés : Haut Potentiel, Rapport au Corps, Cérébralité, Lâcher-Prise, Sexualité
Abstract
High intellectual potential is studied for several decades. His definition begins being clear, but whereas it is further supported in professionnal, educational and even therapeutic domains, his impact on body and sexuality remains unknown.
A balanced sexuality requires letting go and sweet surrender to others and present time. It seems therefore logical to wonder about the impact that an exacerbated cérébralité, a hard intellectualisation, which could have on Sexual Health.
This job should verify the presence of intrusive intellectualization, marks of a critical relationship to the body and possible sexual dysfonctions in high potentiel people.
In case of cause and effect relationship, is it relevant to offer a specific therapeutic accompaniment?
Key words : High Potential, Body, Cerebral type, Letting Go, Sexuality
Sommaire
Adultes haut potentiel et rapport au corps : quel impact sur la sexualité ?. 1
La question du haut potentiel 5
Rapport au corps: premières observations. 16
Sexualité: résultats globaux. 22
La question de l’hyperesthésie. 26
Vers un haut potentiel érotique ?. 33
Introduction
« C’est vrai que je ne suis pas n’importe qui. J’ai un quotient intellectuel de 130.
Cela signifie que j’ai un niveau d’intelligence exceptionnel. C’est important, l’intelligence.
L’intelligence, c’est le seul outil qui permet à l’homme de mesurer l’étendue de son malheur«
(Pierre Desproges).[1]
Le haut potentiel intellectuel a fait l’objet de nombreuses études, notamment ces dernières années. Outre les publications médicales de plus en plus nombreuses, de multiples conférences, reportages, communications permettent de sensibiliser le grand public à cette particularité, et rendent possibles un diagnostic plus précoce, et par conséquent un meilleur accompagnement, scolaire bien sûr, mais également thérapeutique.
Si l’on a passé des décennies à étudier la construction de l’intelligence, sa possible évaluation, à tenter d’optimiser les chances des jeunes « surdoués » de réussir leurs études et leur carrière, le corps des hauts potentiels est resté, lui, longtemps terre inconnue. Il commence cependant à être étudié, notamment dans le sens de la recherche d’éventuelles particularités biologiques. Les récentes découvertes en neurosciences ouvrent de nouvelles perspectives dans cette direction, éclairant les connaissances que l’on avait jusque-là sur le sujet.[2]
Cependant, la relation qu’entretient le sujet haut potentiel à son corps reste peu étudiée, quant à la sexualité, elle n’est pas questionnée. Or, la santé sexuelle est aujourd’hui reconnue comme faisant partie intégrante de la santé globale. Il paraît légitime de s’interroger sur le bien-être sexuel d’une population chez qui l’intellect occupe l’espace, peut-être au détriment du corps. De plus, la sexualité nécessite un minimum de lâcher-prise, physiologique et psychique. Si le système nerveux sympathique n’est pas mis de côté pour un temps, le rapport sexuel s’en trouve compromis. Il semble donc cohérent de se demander si cette puissance intellectuelle n’a pas un impact sur la santé sexuelle.
Cette étude vise ainsi à examiner, chez des adultes à haut potentiel, le rapport au corps, et à la sexualité.
Peut-on constater la présence d’une intellectualisation envahissante ? Y a-t-il des marqueurs de rapport au corps potentiellement conflictuel, et enfin, retrouve t’on des dysfonctions sexuelles ?
En cas de lien de cause à effet, est-il possible et nécessaire de proposer un accompagnement thérapeutique spécifique ?
La question du haut potentiel
Il s’agit avant tout de définir, ou tenter de définir, le haut potentiel.
De nombreuses études ont été réalisées, des recherches, des méta analyses. Terman il y a un siècle bientôt réalisait une étude longitudinale d’ampleur, et élaborait de nouveaux tests d’aptitude.[3]
Les termes varient en fonction des époques, des pays, des experts: on parle en France de « surdoué » ou « précoce », aux Etats-Unis on préfère le terme de « gifted ». Chaque terme a sa connotation, ainsi le « surdoué » ou « gifted » aurait reçu un don, une grâce divine, le « précoce », lui, serait en avance sur les autres individus de son âge, -jusqu’à ce que les autres le rattrapent un peu plus tard?[4]
Parfois on fait la distinction entre ces différents termes, y associant une certaine catégorie de personnes « douées »: ainsi l’enfant précoce serait en avance dans ses apprentissages, mais susceptible d’être plus tard rattrapé par ses pairs, tandis que le haut potentiel aurait des capacités supérieures, mais non forcément exploitées. Enfin le surdoué aurait réalisé toutes ses potentialités. Ainsi prend-on souvent l’exemple du précoce petit Mozart, composant ses premiers menuets à six ans, et du petit Einstein, au légendaire retard de langage, tous deux surdoués donc, mais pas tous deux précoces.
Ici le terme de Haut Potentiel sera utilisé, étant considéré comme le plus inclusif, et ne se basant pas sur les résultats (scolaires, professionnels) ni sur une quelconque « avance », et prenant en compte la part du potentiel parfois inexploré ou irréalisé.
Quels que soient les termes utilisés, la définition repose sur la notion d’intelligence, au sens étymologique d’intellegere, comprendre, saisir, discerner. Soit une capacité à comprendre le monde, à saisir les processus en jeu, une adaptabilité cognitive.
Mais la vision d’une intelligence unique a été remise en question ces dernières années. Ainsi, de nombreuses recherches ont porté sur l’inventaire des différences formes d’intelligence: sociale, émotionnelle, verbale, créative, etc, et plusieurs tests d’évaluation d’une intelligence plus « globale » ont été proposés, par Binet, Wechsler, Gardner, Renzulli,…[5]
Ces tests permettent d’obtenir un Quotient Intellectuel, analysable au regard de la moyenne estimée de la population générale. Ils sont réévalués régulièrement, adaptés à l’époque (ainsi le QI moyen contemporain est-il estimé plus élevé qu’il y a cinquante ans, et la médiane est-elle donc relevée régulièrement. Autrement un dit un QI médian de cent n’est pas le même aujourd’hui qu’en 1960) et au contexte culturel.
La notion de QI, même si elle fait l’objet de débats légitimes, reste donc une base commune à l’estimation de l’intelligence, bien que ne prenant pas en compte les dimensions émotionnelles et relationnelles: il s’agit bien ici d’évaluer l’intelligence logique, verbale, la rapidité de traitement, la mémoire, bref les capacités intellectuelles au sens strict du terme.
Figure 1 Courbe de Gauss
Source: http://www.apprendreaapprendre.com/reussite_scolaire/lintelligence-qi-1/
Aujourd’hui les débats restent vifs mais un certain consensus établi le haut potentiel intellectuel aux environs des 130 de QI, soit deux écarts types au dessus de la moyenne.
128 dans certaines études, 132 dans d’autres, 135, la limite reste cependant encore floue, et possiblement arbitraire: ainsi certains tiennent aux symboliques 2% de la population, soit un QI à 132, d’autres distinguent également les THQI, supérieurs à 145. Enfin des sociétés de hauts QI (high IQ societies) s’organisent en fonction de l’écart-type…
Figure 2 classement des HQI selon mensa
Source: http://www.triplenine.org/WhatisTNS/AQuickWordonIQ.aspx
QI autour de 130 donc, et nécessité d’un entretien psychologique associé, ainsi que prise en compte de facteurs coexistants. Le QI est en France le plus fréquemment calculé sur la base de l’échelle de Wechsler mise à jour régulièrement (actuellement WISC V pour les enfants, WAIS IV pour les adultes), composée de subtests évaluant les différentes formes d’intelligence.[6]
Facteurs concomitants
Se pose également la question de l’intérêt du dépistage: à quoi bon diagnostiquer les haut potentiels, sinon dans une perspective eugéniste, productiviste ou élitiste (de nombreuses études du siècle dernier se concentrent exclusivement la réussite universitaire et professionnelle des sujets, évaluant leur salaire annuel, leur taux de publications, etc…). Sans compter qu’un haut potentiel n’implique pas forcément la réalisation de celui-ci. Certains modèles d’intelligence incluent ainsi la performance et l’engagement, excluant les cohortes de haut potentiels non réalisés.
Cependant, ces dernières années, d’autres études voient le jour, qui présentent un profil plus nuancé du haut potentiel, et des pistes thérapeutiques plus vastes.
On s’accorde aujourd’hui à ajouter au QI global la notion de variabilité intra-individuelle, qui ferait partie intégrante du profil de certains[7] HP[8]. En effet de nombreux haut potentiels présentent une grande hétérogénéité des résultats, ne permettant pas toujours de calculer un QI total.
Figure 3 nouvelle version de l’échelle de Wechsler
Source: https://ecpa.fr/psychologie-clinique/test.asp?id=2046
Ainsi des résultats très hétérogènes en fonction des indices évalués donnent-ils un résultat en dent de scie, pour lequel il n’est pas toujours possible d’établir une moyenne.
Ce facteur se retrouverait dans de nombreux profils et pourrait faire partie intégrante de la définition du haut potentiel.
Cette variabilité peut également affecter le développement harmonieux de l’enfant. Ainsi, JC Terrassier évoque le syndrome de dyssynchronie: une forme de dysharmonie entre le développement précoce de l’intellect et celui de l’affect, ou entre intellect et motricité, etc…[9]
D’une certaine façon, certaines étapes de la maturation psychique se feront « trop » tôt, par rapport à la maturité affective ou motrice. Ainsi pour exemple l’enfant qui prend conscience de la faillibilité de ses parents précocement, à l’âge ou son affect réclame encore une contenance rassurante. Ici l’intellect, outil merveilleux, n’est d’aucune aide et l’enfant s’en trouve d’autant plus démuni. Pire, son intelligence l’amène à des prises de conscience existentielles ou conceptuelles que ses émotions, son affectivité d’enfant ne peuvent assumer. Et dans un autre sens, ses émotions enfantines laissent son intelligence désarmée, incapable d’analyser rationnellement ce qui ne peut l’être.
« L’intelligence de l’enfant exerce un “effet loupe” non seulement sur la logique de l’environnement mais également sur sa perception et son interprétation des afférences affectives. L’acuité de son regard sur les autres et sur le monde aiguise une sensibilité qui n’a pas toujours les moyens d’intégrer sans dommage l’information reçue. […] L’anxiété et les phobies habituellement liées à une culpabilité d’ordre œdipien ne relèvent pas du registre de la raison et de l’intelligence, ce qui déconcerte d’autant plus ces enfants habitués à maîtriser sur ce mode ». [10]
Des recherches récentes tendent également à démontrer que les personnes haut potentiel présenteraient un profil « Hyper »: hyperémotif, hyperesthésique, hypersensible, hyperempathique.
Pour l’enfant, il s’agit donc souvent d’un hyper-envahissement du monde extérieur:
les sons, les odeurs, les sensations, les émotions le submergent, sans qu’il soit armé pour gérer
cet envahissement.[11]
« Sur un plan émotionnel, la réactivité émotionnelle, liée à une vulnérabilité particulière de l’amygdale, fragilise la personnalité. Avec l’émotion au bord des lèvres, constamment, le surdoué réagit avec une intensité exacerbée à la moindre vibration émotionnelle de l’environnement. L’hyperesthésie (capacité développée de l’ensemble de cinq sens) renforce cette hypersensibilité affective : toute perception est amplifiée, grossie, démultipliée. Le surdoué voit ce que les autres ne voient pas, entend ce que les autres ne perçoivent pas, ressent fortement et parfois violemment ce qui échappe à la plupart d’entre nous. La grande susceptibilité, retrouvée dans tous les profils de surdoués, est une des conséquences de ce processus neuropsychologique de sensibilité émotionnelle exacerbée et mal contrôlée ». [12]
D’où des profils d’enfants parfois étiquetés « difficiles », souvent diagnostiqués suite à une demande des enseignants et à de multiples échecs scolaires: enfants qui s’ennuient en classe, ne « tiennent pas en place », se sentent incompris, et qui parfois désinvestissent totalement l’apprentissage scolaire.
Le haut potentiel se profilerait donc de manière plus nuancée que l’image stéréotypée du premier de classe : – une intelligence basée sur une grande adaptabilité cognitive et un mode de raisonnement en arborescence et non linéaire[13] ; – une personnalité plutôt anxieuse, souvent hyperémotive, hyperesthésique, empathique, curieuse, imaginative; on trouve chez de nombreux enfants des troubles du sommeil, mais avec une phase de sommeil paradoxal en moyenne plus longue[14] [15] ; – de plus grandes difficultés à socialiser, chez des enfants qui préfèrent la compagnie et la conversation des adultes, les enfants de leur âge n’ayant pas les mêmes centres d’intérêt, avec une communication difficile, du fait de la difficulté à savoir traduire, vulgariser sa pensée complexe, et à comprendre les attentes d’autrui. |
De nombreux adultes à Haut Potentiel non diagnostiqués se retrouvent ainsi à errer de diagnostic en diagnostic : autisme asperger ? Troubles borderline ? Mélancolie ? Avant d’identifier sur le tard leur haut potentiel, souvent à l’occasion du diagnostic de leur propre enfant.
Cette vision actuelle, plus nuancée, permet à la question de l’identification de se poser non plus en terme de sélection d’une quelconque élite, mais bien de prise en charge d’une population sensible, qui, bien accompagnée, peu réaliser un certain nombre de ses potentialités, mais est sujette également à des troubles qui nécessitent une vigilance continue.
Face à cela, se pose légitimement la question de l’impact que peut avoir le haut potentiel sur le rapport au corps et la sexualité.
Dyssynchronie entre intellect et sphères émotionnelles et motrices, anxiété, hyperesthésie, sensation d’agression continue du monde extérieur, tout cela ajouté à un intellect sans cesse actif, au « petit vélo » dans la tête souvent cité: « Hypersensibilité aussi bien mentale que physique, surintellectualisation avec incapacité à débrancher le cerveau « * [réponse anonyme[16]] .
Comment se construit la relation au corps dans ce contexte? Et comment se traduit-elle dans la sexualité?
1ère partie
« Je suis parti en excursion avec des camarades. Au bout de quelques heures de marche, ma fatigue croît. Elle finit par devenir très pénible. Si j’interroge l’un de mes compagnons, il m’expliquera qu’il est fatigué, certes, mais qu’il aime sa fatigue : il s’y abandonne comme à un bain, elle lui paraît en quelque sorte l’instrument privilégié pour découvrir le monde qui l’entoure, pour s’adapter à la rudesse rocailleuse des chemins, pour découvrir la valeur “montagneuse” des pentes ; de même c’est cette insolation légère de sa nuque, et ce léger bourdonnement d’oreilles qui lui permettront de réaliser un contact direct avec le soleil […] Ainsi, la fatigue de mon compagnon est vécue dans un projet plus vaste d’abandon confiant à la nature, de passion consentie pour qu’elle existe au plus fort, et en même temps, de domination douce et d’appropriation. C’est ce qu’expriment les mille conduites dites d’abandon. S’abandonner à la fatigue, à la chaleur, à la faim et à la soif, se laisser aller sur une chaise, sur un lit, avec volupté, se détendre, tenter de se laisser boire par son propre corps. Tous ces comportements ont pour origine un projet initial de récupération du corps, une tolérance profonde à la facticité. […] Ce qui paraît évident après notre analyse, c’est que la façon dont mon compagnon souffre de sa fatigue, s’oppose radicalement à la mienne, où je découvre sans peine une méfiance vis-à-vis de mon corps, et de l’en-soi en général »
(Jean Paul Sartre)[17].
Conditions d’enquête
Cette enquête a été réalisée de mars à juillet 2017, en majeure partie sur les espaces de discussion virtuels (forums internet d’adultes à haut potentiel), et pour une petite part via le réseau professionnel et personnel, à travers un questionnaire en ligne, conçu sur Google Forms. Choix a été fait d’un anonymat complet des réponses, ce qui a permis de toucher 165 répondants de 18 à 68 ans.
On peut s’interroger sur le risque de « triche » ou de « sabotage », mais c’est un risque inhérent à toute enquête, quelle qu’elle soit: que la récolte des réponses se fasse de visu ou sur internet, sur la base d’un dépistage médical ou au hasard de la rue, le pari de l’honnêteté du répondant est pris, et les différents biais intégrés. Ici, le format totalement anonyme permet de réduire les risques liés aux phénomènes de désirabilité sociale ou de halo. De plus les répondants étaient tous volontaires, aucun mailing n’a été réalisé pour le recrutement, et il semble au vu des réponses que tous ont « joué le jeu » (grand nombre de réponses textuelles argumentées aux questions ouvertes), malgré quelques répondants peu motivés (cochant systématiquement la première case).
La question du diagnostique de haut potentiel est posée, et 79,39% répondent par la positive.
Encore une fois il s’agit de déclaratif, la vérification de ces informations présentant un sérieux frein: combien auraient accepté de répondre en devant joindre le résultat nominatif de leur test pour accéder au questionnaire? Il ne serait plus question d’anonymat dans un tel cas, et la démarche aurait été grandement complexifiée, réduisant sans doute drastiquement le nombre de volontaires.
Encore une fois le pari de l’honnêteté des répondants a été pris.
Il est a noter que 20,61% des répondants déclarent n’être pas diagnostiqués.
Un autre biais sérieux est celui inhérent aux forums internet: une grande partie des membres de ces forums a découvert récemment son hp (ce qui se retrouve dans l’enquête), et se trouve en pleine interrogation/révélation: « c’était donc ça! ». Beaucoup de difficultés individuelles, sociales, psychiques, relationnelles se trouvent éclairées, et justifiées par le hp. Le risque est donc ici que le hp ne cristallise tous les problèmes, miraculeuse explication à postériori de tout ce qui a fait mal, ou été mal fait.
Cependant une grande similarité dans les réponses des personnes diagnostiquées dans l’enfance, et non recrutées sur les forums, est observée, par conséquent, si ce risque de cristallisation ne peut être balayé, il ne peut être réduit aux usagers des forums. Des hp recrutés en cabinet ou croisés dans la rue présenteraient le même « risque ».
De plus, dans toute particularité psycho-physiologique, les implications sommatives et psychiques forment un large réseau d’interdépendances. Et si le hp n’est en aucun cas un état pathologique, il n’en reste pas moins impliqué dans de nombreux processus du développement. Ainsi une personne interrogée évoquait sa « maladie du haut potentiel »…
Objectifs de l’enquête
L’objectif étant d’interroger le rapport au corps, le questionnaire se penche sur des marqueurs susceptibles de traduire une relation au corps conflictuelle ou problématique (scarification, modification corporelle, troubles du comportement alimentaire, addictions).
La capacité au lâcher-prise et l’intérêt sexuel sont également explorés.
Puis un focus est réalisé sur différentes dysfonctions sexuelles (réponses en échelle paire, du type jamais-parfois-souvent-toujours). Enfin une question ouverte permet de récolter de nombreux témoignages et éclaircissements.
Vue d’ensemble du panel
Le panel est composé de 57,58% de femmes, 42,42% d’hommes, âgés de 18 à 68 ans (moyenne de 36 ans), diagnostiqués pour 79,39% d’entre eux, avec un diagnostique concomitant dans 13,94% des cas (6,67% d’autisme diagnostiqué ou suspecté, 4,85% de divers troubles cognitifs).
Les différents milieux professionnels sont présents (10,76% sans emploi, 9,5% étudiants, 15,19% employés, 12,66% enseignants, 15,8% professions libérales, 22,8% cadres, 4,4% professions intellectuelles supérieures, 7,6% artistes), assurant une bonne représentativité de la population, loin des clichés du hp systématiquement Einstein ou Mozart.
Seuls 18% d’entre eux ont été diagnostiqués avant 18 ans (23,6% des hommes contre 13,7% des femmes).
L’analyse statistique a été réalisée par l’Unité de Méthodologie Biostatistiques et Datamanagement du CHRU de Lille, à l’aide du logiciel SAS, version 9.4.
Les variables qualitatives ont été décrites par les effectifs et les pourcentages, et les variables quantitatives non-Gausienne par la médiane et l’intervalle interquartile. La distribution des variables quantitatives a été appréciée graphiquement et à l’aide du test de Shapiro-Wilk.
Pour les comparaisons de fréquences entre deux groupes (le genre, l’âge du diagnostic avant ou après 18 ans puis le lâcher-prise) sur les paramètres qualitatifs (pratique d’une activité artistique, sportive et les divers troubles), le test du Chi² ou du Fisher exact ont été utilisés. Pour les comparaisons entre les deux groupes et les données numériques, le test U de Mann-Whitney a été utilisé pour comparer les distributions. Enfin pour les analyses sur les données ordinales, le test de tendance a été appliqué. Le niveau de significativité des tests statistiques a été fixé à 5%[18].
Certains résultats annexes ont été obtenus avec l’aide du logiciel SPSS, et de l’outil classeur Open Document du pack Openoffice.
Les résultats seront ici proposés dans l’ordre du questionnaire.
Rapport au corps: premières observations
75,61% des personnes interrogées pratiquent une activité artistique ou sportive, et 28,66% ont trois activités ou plus.
33,94% déclarent avoir souffert de troubles du comportement alimentaire dans l’enfance (« Avez-vous souffert de troubles du comportement alimentaire (anorexie, boulimie)? ») avec 43,2% des femmes contre 21,4% des hommes, et 52,2% des personnes diagnostiquées dans l’enfance.
A l’âge adulte 33,33% déclarent les mêmes troubles, avec 40% des femmes, 24,3% des hommes, 43,5% des personnes diagnostiquées avant 18 ans. S’agit-il de tca avérés, auquel cas les chiffres paraissent importants, ou d’épisodes passagers de relation conflictuelle à la nourriture (régimes, etc…)? La question mériterait d’être explorée plus avant dans une étude médicale.
27,27% déclarent des scarifications dans l’enfance (« vous êtes-vous mutilé volontairement (scarification,.. ».) 30% des hommes contre 25,3% des femmes. 43,5% des personnes diagnostiquées avant 18 ans se sont scarifiées. 16,97% continuent à l’âge adulte, 15,8% des femmes, 18,6% des hommes, 26,1% des personnes diagnostiquées dans l’enfance .
Il est difficile de comparer ce résultat à la population générale, cependant des enquêtes récentes [19] évoquent 4 à 10%, des adolescents.
Le chiffre paraît donc ici assez remarquable, et le fait que les hommes soient plus touchés va également à l’encontre des observations habituelles, qui soulignent toutes une plus grande représentation de jeunes filles.
28,4% déclarent avoir fait réaliser une modification corporelle (« Avez-vous fait réaliser des modifications corporelles (tatouage, piercing, burning,…)? ») avec 36,8% des femmes, 17,1% des hommes, répartition genrée qui rejoint les observations habituelles sur la population générale. Il aurait été intéressant de distinguer les différentes pratiques (tatouage, piercing, burning, scarification, implants) afin d’avoir une vision plus précise. Il est à noter cependant que cela concerne 8,7% des personnes diagnostiquées avant 18 ans, contre 32,1% après 18 ans.
A la question « Avez-vous eu des conduites addictives » à l’âge adulte, 53,33% répondent par la positive , 68,6% des hommes, 42,1% des femmes.
Dans l’enfance cela concerne 49,09% des répondants, 61,4% des hommes, et 40% des femmes.
Cependant une grande variété de conduites sont considérées comme addictives par les répondants. Se retrouvent ainsi pèle-mêle le sucre, la lecture, les gâteaux, l’écriture, la télévision, le pouce, etc… Les résultats classés donnent 10,9% d’addictions à l’alcool (18,6% des hommes contre 5,3% des femmes), 20% aux produits psychoactifs (28,6% des hommes,13,7% des femmes), 7,9% de dépendances alimentaires (4,3% des hommes, 10,5% des femmes), 8,5% de cyber addictions (17,1% des hommes, 2,1% des femmes) et 4,8% de dépendances affectives et sexuelles (8,6% des hommes, 2,1% des femmes).
Sur la question des violences ou abus sexuels, 25% déclarent en avoir subi dans l’enfance, 20,3% des hommes, 28,4% des femmes, et à l’âge adulte 20,25% des répondants, 25,3% des femmes, 13,2% des hommes.
La question a été formulée de manière volontairement vague (« Avez-vous subi des violences ou abus sexuels? »), sans référence à une définition légale, considérant que le ressenti empirique et ses conséquences psychiques priment. L’importance des résultats pose question, néanmoins on sait que les chiffres concernant la population générale sont également importants, et que des études régulières tendent à démontrer l’ampleur du phénomène, de manière plus précise chaque année.
Concernant la sexualité, l’âge moyen du premier rapport avec pénétration est de 19 ans (mini 9, maxi 44) , avec chez les hommes une moyenne de 20,3 ans (min 14 max 44), et chez les femmes 18,2 (min 9 max 31).
Se constate ici un écart avec la population générale (En 2010, l’âge médian au premier rapport sexuel, est de 17,4 ans pour les garçons et de 17,6 ans pour les filles selon l’Inpes, baromêtre santé 2010), et plus étonnant, un âge du premier rapport plus tardif chez les hommes que chez les femmes. Ainsi, 25% des hommes interrogés ont eu leur premier rapport après 23 ans, et deux d’entre eux, jamais (« non connu, le sexe est primitif »*).
Parmi les personnes ayant rencontré un problème sexuel, seules 20,25% se sont tournées vers un professionnel (« Si vous avez rencontré l’une de ces difficultés, en avez-vous parlé à un professionnel? »). Elles se sont adressées à un psychologue/psychiatre pour 39,39%, à un gynécologue pour 27,27%, à un médecin généraliste pour 9,09%, un sexologue pour 21,21% (autre: 3,03%).
Seuls 9,17% d’entre eux ont évoqué leur haut potentiel à cette occasion (« Avez-vous évoqué votre haut potentiel avec lui? » ), bien que 75% de la population totale soit convaincue de l’impact du hp (« Pensez-vous que votre haut potentiel impacte d’une manière ou d’une autre votre sexualité et/ou votre rapport au corps? »).
Discussion
Cette première approche du panel est à priori assez représentative de la population étudiée: grande diversité professionnelle, rapport hommes/femmes à peu près équivalent à la population générale.
Il est intéressant de noter que les hommes sont plus fréquemment diagnostiqués dans l’enfance que les femmes (conséquences des stéréotypes de genre? » Implicitement, on s’attend à ce que les garçons soient indisciplinés, rebelles, fumistes. Cette pression exercée par les pairs et naturalisée par l’école (« les garçons sont naturellement plus turbulents, moins appliqués, etc. » entend-on régulièrement) entraîne le fait qu’ils sont quatre fois plus souvent punis que les filles, se retrouvent plus souvent en échec scolaire ». [20])
On constate également que les personnes diagnostiquées avant 18 ans déclarent plus de mutilations corporelles, de troubles du comportement alimentaire, mais étonnamment bien moins de modifications corporelles.
Il serait intéressant ici de savoir si le diagnostique a précédé ou suivi ces troubles. Dans le dernier cas, on peut raisonnablement supposer que l’expression d’un mal-être a mené à la consultation d’un spécialiste, lequel en est venu à diagnostiquer un haut potentiel.
Dans le cas contraire (diagnostique suivi des troubles), se pose la question de l’impact du diagnostique, et de l’efficacité de la prise en charge. Il est à noter cependant que la population étudiée a une moyenne d’âge de 36 ans, et qu’à l’époque le haut potentiel était plus considéré comme une bénédiction que comme un facteur de mal-être, d’où peut-être un suivi plus axé sur la réussite scolaire (saut de classe, etc) que sur la psychopathologie.
La question des scarifications est d’importance, étant donné l’importance des pratiques déclarées, et l’étonnante représentativité masculine.
La scarification adolescente est de plus en plus étudiée ces dernières années, devant l’augmentation des pratiques ; ainsi une enquête menée en 2001[21] auprès d’une sous-population d’adolescents fréquentant régulièrement l’infirmerie de leur établissement, représentative selon les enquêteurs de « ceux qui vont le plus mal », puisque présentant deux à trois fois plus de conduites à risque que les autres, constate que 26,7% des filles et 20,6% des garçons déclarent avoir déjà pratiqué la mutilation.
Chiffres à peu près équivalents à ceux qui se retrouvent dans la population ciblée, quoique plus élevés chez les hommes. Alors, population qui « va mal » ?
Plus surprenant, la perpétuation des pratiques à l’âge adulte, avec 16,97% des répondants, soit un chiffre encore bien supérieur à celui de la population générale des adolescents.
Or, si la scarification fait aujourd’hui partie du « paysage » adolescent, tout en restant un signe de mal-être à ne pas négliger, certaines formes atypiques alertent les spécialistes: « L’expérience clinique indique que les scarifications, abrasions et brûlures doivent être considérées comme atypiques lorsqu’elles présentent les caractéristiques suivantes :survenue avant la puberté ou après 18 ans […], forme d’autoagression observée chez un garçon« [22]
Scarifications atypiques donc, qui doivent faire « évoquer l’hypothèse de troubles plus profonds, plus structuraux « (op.cit.). Mais quel sens auraient alors ces pratiques?
Affirmation de l’individualité, besoin de briser un nœud œdipien, appel au secours, expression d’une souffrance psychique?
La peau n’est pas le moindre de nos moyens de communication, avec l’extérieur et avec soi-même,
« Palimpseste dont seul l’individu détient la clé, elle conserve, à la manière d’archives, les traces de l’histoire individuelle. » [23] Or l’adolescent, « mal dans sa peau », coincé dans un corps en mutation, face à un monde qui soudainement prend corps lui aussi et lui semble tout à coup bien inquiétant, peut symboliquement essayer de faire « peau neuve » en modifiant ce corps presque étranger, pour devenir un autre, et paradoxalement également le faire sien en le marquant durablement. Moyen d’atténuer la douleur psychique également, qui en se traduisant dans le corps se tait le temps d’une coupure. Tentative de soulagement, « saignée » qui relâche la pression interne. Décharge brutale qui exprime physiquement, corporellement, un trouble intérieur trop difficile à traduire par les mots. Verbalisation de l’indicible, inscription cunéiforme d’un chaos interne. Le corps comme outil de communication.
Dans la population étudiée, peut se poser l’hypothèse que la scarification recouvre la même symbolique du rapport au corps. Cependant les difficultés liées à l’hyper intellectualisation (« j’oublie parfois mon corps à trop intellectualiser »*, « Surinvestissement de l’intellect au dépend du corps. »* « Désynchronisation entre le ressenti corporel et le ressenti émotionnel/cérébral »*) et la dyssynchronie corps/esprit font du corps non plus un moyen de communication, mais un corps étranger, inconnu, véhicule dérangeant parfois quand il déborde de sensations inexplicables (hyperesthésie) et irrationalisables, qu’on choisit de mettre à distance pour éviter l’envahissement: « Peut-être que c’est une très grande sensibilité (liée au haut potentiel) et une façon de percevoir le monde très kinesthésique (à travers le corps) qui au fil de la vie a créé cette distanciation comme protection face à un monde souvent ressenti comme violent »*.
Inquiétant étranger dont on ne prend conscient parfois que tardivement : » Ce questionnaire pourrait aussi demander le fait d’être conscient d’avoir un corps (vers 23 ans j’ai « capté » que je n’étais pas qu’un « cerveau sur pattes ») »*. Compagnon inconnu, avec lequel on tenterait parfois de communiquer, en se faisant mal, pour le ressentir quand on le choisit et non plus quand il s’impose.
La scarification comme prise de pouvoir, moyen de contrôle peut-être?
Ce besoin de contrôler et de comprendre, de maîtriser l’information, est une caractéristique commune à beaucoup d’enfants à haut potentiel. On peut supposer que la scarification s’inscrit donc également dans cette logique.
Les addictions auraient-elles la même signification, dans leur dimension d’anesthésie du psychisme et du corporel? Ne plus rien penser, ne plus rien sentir. Ainsi les addictions à l’alcool et aux produits psychoactifs (respectivement 10,9% et 20%) pourraient s’inscrire dans cette dynamique.
Tout cela dresse donc le tableau d’une population en difficulté dans la relation au corps, un corps inconnu, envahissant, incompris (« négation du corps »*), parce qu’incontrôlable, irrationnel, et si trivial: « Je pense que nous autres, HP avons un rapport au corps différent des personnes lambda, pas que nous ne nous y intéressons pas, mais cela est moins intéressant en terme de jouissance intellectuelle »*.
Corps outil également, qu’on peut maîtriser partiellement
« Mon cerveau ne s’arrête jamais de tout analyser. Je ne lâche jamais prise. Je maîtrise mon corps. Je régule ma douleur quand je souffre physiquement. Je visualise la douleur et l’adoucis »*, mais le plus souvent à distance, sans l’habiter pleinement.
Corps lointain enfin, délaissé, noyé sous l’afflux de pensées: « La pensée ne laisse pas assez d’espace au corps pour exister par lui même »*
Désincarnation et hyperintellectualisation, ces deux concepts reviennent très souvent dans les témoignages, et résument une grande partie des situations. Il est à souligner que quelques uns témoignent à contrario d’une expérience d’hyperesthésie, vécue plus ou moins positivement, et sur laquelle on reviendra plus loin.
Cette vue d’ensemble permet de se poser la question du vécu de la sexualité dans ce contexte bien particulier.
Y a t’il un impact ? Si oui, comment se traduit-il ?
2ème partie
« Le Dr Strauss estime que, émotionnellement, je suis encore à ce stade de l’adolescence où le fait d’être près d’une femme, de penser à l’amour sexuel, provoque l’anxiété, la panique et même des hallucinations. Il pense que mon rapide développement intellectuel m’a fait croire que je pouvais avoir une vie émotionnelle normale. Je dois me résigner à accepter ce fait: les craintes et les blocages déclenchés dans des situations érotiques révèlent que, émotionnellement, je suis encore un adolescent »
(Daniel Keyes)[24]
Sexualité: résultats globaux
L’âge médian du premier rapport avec pénétration, et cette différence significative entre hommes et femmes (hommes 19,5, femmes 18, s 0,007), plus élevé que dans la population générale, peut sans doute s’expliquer par le surinvestissement de l’intellect au détriment du corps.
Même dans la séduction, l’intellect prime: ainsi de nombreux répondants se déclarent sapiosexuels (attirance sexuelle pour les personnes intelligentes, « La sapiosexualité est […] un concept qui place l’intelligence d’une personne comme le critère déterminant de l’excitation sexuelle.« [25]
Intellect utile parfois pour séduire, « il facilite la séduction autant qu’il gêne l’intimité »*, mais maître exigeant:
« Il me semble que la qualité et la force recherchées du lien émotionnel et spirituel sont plus grandes que pour beaucoup de personnes, et qu’elles sont beaucoup plus difficiles à satisfaire »*.
Une acuité qui peut être utile, par la distance et l’analyse qu’elle permet:
« Je pense que l’intelligence permet de prendre un recul parfois intéressant dans les relations affectives. Et un peu d’intelligence permet aussi d’échapper à tous les clichés et modes de plus en plus présents dans les magazines et l’air du temps en matière de « normalité » sexuelle… »* mais qui freine la communication avec autrui:
« certainement une propension à trop intellectualiser les choses, et au fond à ne rien vraiment comprendre aux relations humaines »*. Cette difficulté à interagir avec autrui, cette sensation de décalage, typique de beaucoup d’hp, cette lucidité exacerbée freinent sans doute la construction de liens amoureux précoces.
Voire condamnent à la solitude: « solitude liée à un qi dépassant le 4e écart type, autrui inintéressant, aucune relation n’étant de fait envisageable »*.
Qu’en est-il dans le cadre de la sexualité ?
A la question « parvenez-vous à « lâcher-prise » durant les rapports sexuels? », 19,39% répondent jamais, 46,67% parfois, 22,42% souvent et 11,52% toujours. Les chiffres hommes/femmes sont à peu près équivalents. Environ un tiers (33,94%) qui y arrive donc le plus souvent, mais près d’un cinquième qui n’y parvient jamais. (les 46,67% de « parfois » sont difficilement analysables, est-ce au sens de « rarement »? « Pas souvent » en tout cas. Il aurait peut-être été nécessaire de réaliser une échelle plus précise).
« Peur de perdre le contrôle, rejet d’un corps qui ne me plait/correspond pas, peur de décevoir, intellectualisation de tout, difficultés à lâcher prise… »* Ici aussi l’intellect envahit tout, et le besoin de contrôle empêche un abandon total.
« difficulté à arrêter de penser pendant ou avant l’acte », « Trop dans le mental, analyse constante de ce qui se passe lors d une relation sexuelle, mal à faire confiance, regard négatif sur mon corps…tout cela n’aide pas à lâcher prise… »*.
En ce qui concerne l’intérêt sexuel, (« Comment définiriez-vous votre intérêt sexuel »), 41,82% le disent important, 36,36% moyen, 20% faible, et 1,82% inexistant. Ici l’écart entre les genres est plus marqué: 61,4% des hommes déclarent un intéret sexuel important, contre 27,4% des femmes. Elles sont 48,4% à le dire moyen (contre 20% des hommes), 22,1% faible (17,1% pour les hommes).
Quant à l’intérêt sexuel inexistant, on trouve 2,1% de femmes pour 1,4% d’hommes.
Il semble que ces chiffres rejoignent d’une certaine façon les représentations stéréotypiques habituelles concernant la population générale (hommes à l’appétit sexuel important, femmes aux appétits plus raisonnables), cependant plus d’un cinquième se déclare faiblement ou pas du tout intéressé, y compris chez les hommes.
Il semble qu’ici encore le sexe soit parfois vu dans toute sa trivialité:
« En induisant une incapacité totale à partager ce qui me semble être la comédie du désir : l’autre s’excite, je le vois s’exciter, et loin de provoquer chez moi une excitation en retour, ça me fait plutôt l’effet d’un spectacle étrange, incongru et vaguement idiot. Et puis il y a le corps en soi, dont mon absence d’excitation me laisse tout loisir de constater le caractère banal et un peu répugnant – en somme tout ce que l’autre aimerait autant que je ne voie pas, et que je vois. « Arrête de penser », « Lâche-toi », je l’ai entendu, si ce n’est que pour moi il ne s’agit pas de ça : ça devrait plutôt être : »Arrête de me voir comme je suis, fais un effort d’imagination, rends-moi désirable, aide-moi à m’oublier ». Et je n’aime pas cette ambivalence : le sexe est-il supposé rapprocher de l’autre ou de son simulacre ? Il y a pourtant de quoi me fasciner dans le corps, des choses qui m’excitent effectivement. Mais c’est toute cette pantomime qui va autour qui me tient éloigné de tout ça »*. Cette notion de mascarade, de pantomime insupportable, parce que transparente, se retrouve dans de nombreux témoignages.
Parfois jusqu’à l’extrême: « Nous voyons le corps humain et ses parties génitales comme simple organe de reproduction, nous jugeons donc que la sexualité est secondaire et ne sert qu’à la reproduction et la persistance de l’espèce[…] »*.
En définitive, « face à une hyperintellectualisation constante, l’acte sexuel a finalement assez peu d’intérêt. »*
Comment s’investir pleinement alors dans un simulacre qui ne fait pas sens, et qu’on observe à distance avec ironie voire dégoût?
Parfois au contraire l’acte sexuel et la décharge sensuelle qu’il provoque permettent d’éteindre pour un instant la pensée et les émotions parasites (au même titre que la scarification?) « Sexualité utilisée compulsivement pour limiter les sur-réactions émotionnelles ainsi que la violence des changements métaboliques saisonniers. ». Moyen de communication/communion avec un corps habituellement si distant:
» Le sexe me permet de sentir mon corps et de retrouver des sensations perdues[…] C’est un moyen pour moi d’enfin me servir de mon corps car sinon, il me sert uniquement de véhicule. »*
En ce qui concerne les troubles sexuels à proprement parler, à la question « Avez-vous déjà eu des troubles du désir sexuel »: 27,3% répondent jamais, 46,7% parfois, 24,2% souvent, 1,8% toujours . Soit 15,8% des hommes souvent/toujours, et 33,7% des femmes.
A la question « Avez-vous déjà eu des difficultés à l’excitation sexuelle »: 26,1% répondent jamais, 56,4% parfois, 17% souvent, 0,6% toujours. Soit 11,4% hommes souvent/toujours, 22,2% des femmes
En ce qui concerne les troubles du plaisir (« Avez-vous déja eu des difficultés à ressentir du plaisir sexuel ») : 24,8% jamais, 55,2% parfois, 18,8% souvent, 1,2% toujours.14,3% d’hommes souvent/toujours, 24,3% des femmes.
Quant à l’orgasme: (« Avez-vous déjà rencontré des troubles de l’orgasme (absence d’orgasme) ») 25,5% jamais, 52,7% parfois, 17,6% souvent, 4,2% toujours. 11,4% des hommes souvent/toujours, 29,5% des femme.
Enfin concernant les douleurs (« Avez-vous déjà eu des douleurs lors des rapports ») 38,8% répondent jamais, 48,5% parfois, 1,9% souvent, 1,8% toujours. Soit 4,3% des hommes souvent/toujours, et 18,9% des femmes.
Discussion
Les différences entre les genres sont ici significatives (<0,001 test Mann-Withney).
Les hommes sont plus fréquemment sujets aux troubles du désir et du plaisir, les femmes aux troubles du désir et de l’orgasme.
« Difficulté à débrancher le cerveau et Clivage corps/esprit. Trop d’anticipation de ce qui va suivre dans mon esprit donc difficulté à être présente à moi-même dans l’instant présent à mon corps et incapacité à ressentir le désir au début des préliminaires.Au bout d’un moment, soit je ne passe pas cette étape, je ne me sens pas à ce que je fais et je laisse tomber en disant « Désolé je ne suis pas vraiment là », soit il y a un déclic et là d’un coup je réintègre mon corps et je ressens une énorme vague de désir et systématiquement le reste de l’acte sexuel se passe super bien. »*
En ce qui concerne les troubles masculins, 5,3% des hommes évoquent avoir eu souvent ou toujours des dysfonctions érectiles (« Avez-vous déjà rencontré des difficultés à l’érection »), et 10,6% souvent ou toujours des éjaculations prématurées (« Avez-vous déjà eu une éjaculation prématurée »).
Il est regrettable de n’avoir pas posé les questions de l’anéjaculation et de l’éjaculation retardée, surtout au vu de la proportion de troubles du plaisir et de l’orgasme chez les hommes.
Dans l’ensemble de la population ciblée, les troubles du désir sont donc les plus fréquents (26% de souvent/toujours). Anticipation, difficulté au lâcher-prise, distanciation, lucidité, intellectualisation, tout cela freine l’abandon fantasmatique.
« Tout est très mental, même à l’excitation, et puis… Les pensées qui sont toujours présentes. »*
Les difficultés à l’excitation découlent du même processus, et si l’excitation peut-être obtenue de manière plus « mécanique » par les hommes, elle reste problématique pour les femmes, pour lesquelles un plus grand investissement sensoriel et fantasmatique est nécessaire.
Les troubles du plaisir et de l’orgasme, pour lesquels le lâcher-prise est indispensable, sont également bien présents, et s’il est habituellement moins systématique pour les femmes d’atteindre l’orgasme, la difficulté à ressentir du plaisir, même sans orgasme, pour 24,3% d’entre elles, pose question. La forte proportion d’hommes (14,3%) à rencontrer ces difficultés est également interpellante.
Enfin la proportion de femmes ayant fréquemment des douleurs est relativement importante également (18,9%). Ici aussi, la difficulté au lâcher-prise entre t’elle en ligne de compte?
La question de l’hyperesthésie
Il semble important ici de noter un facteur souvent cité, parfois vécu positivement, souvent de manière nuancée.
L’hyperesthésie semble jouer un rôle important dans la sexualité des personnes interrogées. Nombre d’entre elles évoquent une sensorialité envahissante, qui vient influencer voire bousculer le rapport sexuel. 18,18% évoquent ainsi dans leurs témoignages une influence massive des sens, parfois « handicapante »: « Le sens sont plus développés, certaines odeurs ou textures sont insupportables et peuvent perturber un rapport. Le toucher est très sensible et peut être douloureux si le partenaire est maladroit. Il est parfois très difficile de se mettre en mode « lâcher-prise ». Un élément perturbateur (mouvement brusque du partenaire, glissement imprévu, étiquette non coupée… ) peut aussi perturber ce lâcher prise. »*
Mais parfois cette sensibilité exacerbée, vécue positivement (« hypersensorialité, contact tactile très stimulant »*) permet d’entrer pleinement dans le rapport sexuel, corps et âme:
« L’exacerbation des sens provoque une jouissance extraordinaire à la fois physique et psychique »*.
Il semble également que l’imagination très active des hp permette à certains répondants d’alimenter leurs fantasmes et ainsi d’alimenter désir et excitation (« inventivité », « créativité », « imaginaire érotique fécond »), utilisant ainsi les ressources de l’intellect au profit de la sensorialité.
Jusqu’à l’expertise parfois: « Connaissance des zones érogènes, ouverture d’esprit »*, » J’utilise la finesse de ma sensibilité pour obtenir un état d’excitation et d’abandon complet chez mes partenaires, en combinant sensualité pure, lecture corporelle et connaissances anatomiques »*.
Équilibre délicat donc, entre pensées envahissantes, sensibilité extrême, et imaginaire actif.
Facilement rompu par l’intrusion de l’un ou l’autre:
« Hypersensibilité sensorielle (odeur !, goût, toucher). Ressentir l’autre pour le contenter au mieux. Ceci impliquant tout mon être, physique et mental. L’observation/appréciation (réelle ou fantasmée) des moindres signes de plaisir/non plaisir, de désir/non désir de la partenaire influe énormément sur mon ressenti, mon comportement. Le jeu de l’amour, du sexe, est un jeu de tensions en équilibre très précaire qui, au lieu de siffler jusqu’à l’explosion des sens, peut pour un petit rien – très signifiant à mes yeux – totalement casser le processus. C’est souvent tout ou rien (quelles que soient les apparences que je donne à voir). Mais quand c’est tout, c’est TOUT ! « *
De plus, le croisement des données permet de constater que la capacité au lâcher-prise est significativement corrélée à l’existence des troubles sexuels. (p=0,001 pour les troubles du désir, du plaisir et de l’orgasme, p=0,002 pour les troubles de l’excitation). Ainsi, plus le répondant déclare savoir lâcher-prise durant les rapport, moins il déclare de troubles sexuels. Il en est de même pour les troubles de l’érection et de l’éjaculation.
De même, l’intérêt sexuel est significativement moins important chez les personnes déclarant des troubles du désir, de l’excitation et du plaisir (p=0,001 pour les troubles du désir et de l’excitation, p=0,048 pour les difficultés au plaisir).
Il est à noter également que les personnes déclarant un intérêt sexuel plus important, ont eu un premier rapport avec pénétration à un âge significativement plus jeune. (20,1 ans pour un intérêt sexuel inexistant à faible, pour 18,8 ans de moyen à important (p=0,002).
Il en va de même pour les personnes déclarant une capacité au lâcher-prise fréquente, de manière cependant moins significative (18,3 ans vs 19,5 ans(p=0,093).
Facteurs d’influence
Au vu de l’influence de la capacité à lâcher-prise sur le bien-être sexuel, il semble nécessaire de s’interroger sur les facteurs qui sont en jeu.
S’observe tout d’abord que les personnes qui déclarent un lâcher-prise suffisant (souvent/toujours) pratiquent significativement plus de sports corps/esprit (arts martiaux, yoga, …), soit 25% d’entre eux contre 10,2% pour ceux qui déclarent des difficultés au lâcher-prise (jamais/parfois).(p=0,012)
En faisant un focus sur la population pratiquant ces sports, il s’avère que 56% des pratiquants déclarent une capacité au lâcher-prise suffisante, contre 30% pour les non pratiquants.
Ils déclarent également moins de troubles du comportement alimentaire (20% contre 35,7% pour les non-pratiquants), légèrement moins de scarifications, mais de manière non significative (12% contre 17,9%), et moins d’addictions (44% contre 55%). Ils déclarent enfin un intérêt sexuel plus important (52% d’intérêt sexuel important contre 40% pour les non pratiquants).
De surcroît il apparaît que les personnes parvenant à lâcher-prise sont légèrement plus nombreuses à pratiquer au minimum trois activités artistiques et sportives (33,9% pour celles répondant souvent/toujours contre 25,9% pour les parfois/jamais. Score non significatif cependant: p=0,28).
Étonnamment, Elles sont également légèrement plus nombreuses à avoir subi des violences ou abus sexuels (32,1% dans l’enfance, 27,3% à l’âge adulte, contre respectivement 21,3% et 16,7% pour les personnes ayant des difficultés à lâcher-prise. Scores non significatifs).
Les pratiques de sports corps/esprit, et de plusieurs activités artistiques et sportives, si elles ont un effet positif sur le lâcher-prise, ne permettent donc pas pour autant à elles-seules d’acquérir cette faculté.
En classant la population en fonction des réponses à la question ouverte « Pensez-vous que votre haut potentiel impacte d’une manière ou d’une autre votre sexualité et/ou votre rapport au corps? », 18,2% des répondants mettent en avant l’impact ressenti sur les sensations (hyperesthésie, sensualité exacerbée). Parmi ces derniers, 53,3% parviennent souvent/toujours à lâcher-prise, et seuls 3,33% n’y arrivent jamais.
43% des répondants insistent quant à eux sur l’hyperintellectualisation et la cérébralité exacerbée. Parmi ces derniers, seuls 22% parviennent à lâcher-prise souvent ou toujours, 28,16% jamais.
Il semble bien que la sensorialité, même quand elle est envahissante, (« […] Je suis très excitable, très sensible, très sensuelle, et quand je suis à l’aise et que je peux lâcher-prise, je suis relativement insatiable, multi-orgasmique, etc. Mais la même sensibilité peut rendre tout contact insupportable dans une situation où je me sens agressée (même par un simple contact non sollicité quand je ne suis pas assez excitée)* »
soit un facteur d’importance dans le lâcher-prise et par là, le bien-être sexuel.
Mais pourquoi cette dichotomie intellect/sensation au sein du groupe cible?
La dyssynchronie intellect-affect, et l’envahissement sensoriel dans l’enfance, ont-ils entraîné une forme d’anesthésie des sens chez certains, faisant de l’esprit le seul maître à bord, et cadenassant toute sensation menaçant de venir perturber désagréablement l’individu?
Il arrive en effet que se mette en place un blocage émotionnel et sensoriel, véritable soupape de sécurité.
Encore une fois, l’intellect prend le dessus, rationalisant à outrance.
Ce mécanisme d’inhibition, quand il atteint ses limites, peut aller jusqu’à une forme d’anorexie intellectuelle:
» Les enfants de quotient très élevé érigent en puissant système de défense l’intelligence et le savoir théorique. C’est l’intellectualisation, froide et rassurante, décrite par Anna Frelm. Elle leur évite, comme le précise Aaron Coriat, de sombrer dans l’angoisse incontrôlée et la décompensation. Lorsque ces défenses deviennent insuffisantes, l’enfant peut en arriver à renoncer à ses aptitudes intellectuelles. »[26] Ici on éteint sensations et intelligence toutes ensembles, érigeant un mur entre soi et le monde, et à l’intérieur même de soi. C’est ainsi que l’enfant « précoce » devient adolescent « attardé », catalogué « difficile et limité », et s’interroge devenu adulte sur son étrange rapport au monde et à lui-même, errant de diagnostic en diagnostic.
Si cette inhibition est réversible dans une certaine mesure, avec une prise en charge (et une pédagogie) adaptées (ibid), il est sans doute envisageable de réveiller de la même manière la sensorialité, pour aller vers un mieux-être corporel et sexuel.
3ème partie
« Le jugement du corps vaut bien celui de l’esprit et le corps recule devant l’anéantissement. Nous prenons l’habitude de vivre avant d’acquérir celle de penser. Dans cette course qui nous précipite tous les jours un peu plus vers la mort, le corps garde cette avance irréparable«
(Albert Camus)[27].
Pistes thérapeutiques
Il semble donc au vu des résultats de cette étude, que certains marqueurs d’un rapport au corps difficile soient présents: scarifications dans l’enfance et à l’âge adulte, troubles du comportement alimentaire (qu’il serait intéressant d’explorer plus précisément dans une autre étude), ces deux marqueurs étant plus importants chez les personnes diagnostiquées dans l’enfance; et addictions, avec notamment 11,5% de polyaddictions.
Quant à la sexualité, elle commence plus tardivement que dans la population générale, et les troubles du désir et du plaisir sont les plus présents, directement corrélés à la capacité au lâcher-prise. Cette dernière paraît plus difficile à acquérir chez les personnes mettant en avant une cérébralité envahissante, alors qu’à contrario l’hypersensorialité ressentie par d’autres semble permettre un lâcher-prise plus important.
Enfin, la pratique de sports corps-esprit et de plusieurs activités artistiques et sportives a un impact relativement positif.
Cette capacité à maintenir un lien entre le corps et l’esprit, et à rester à l’écoute de ses sensations est sans aucun doute une piste à suivre dans l’accompagnement de ces patients.
Intérêt du dépistage
Mais quels patients au juste? La question du diagnostic peut ici légitimement se poser: est-il nécessaire de « tester » le QI de tout patient présentant le profil décrit plus haut? Tout du moins peut-on imaginer poser la question de la « cérébralité », de la présence d’un intellect envahissant additionné d’un rapport au corps inhibé ou conflictuel.
Il ne saurait être question ici de dresser la liste à cocher des caractéristiques d’une personnalité haut potentiel, néanmoins certains traits de caractère se retrouvent chez nombre d’entre eux: pensée divergente, en arborescence, dyssynchronie, hypersensibilité (parfois inhibée), sens de l’humour décalé, capacité d’analyse et besoin de comprendre, sentiment de décalage, distanciation, faible estime de soi, syndrome de l’imposteur, intuition [28].
Il ne serait pas inutile d’évoquer la possibilité du haut potentiel avec ces patients, qui bien souvent, grâce à la médiatisation progressive de cette thématique, se sont déjà posé la question.
De plus il semblerait que le haut potentiel se retrouve fréquemment au sein d’une même famille, et que les affinités amicales rapprochent bien naturellement les hp les uns des autres. Ainsi, si pendant un certain temps un adulte hp peut ignorer sa particularité (« je ne suis pas différent, tout le monde autour de moi est pareil »), le premier diagnostic d’un membre de l’entourage a bien souvent un effet boule de neige, provoquant une prise de conscience ou du moins un questionnement
Choix des thérapies
Au vu des conclusions de cette étude, la piste des thérapies corporelles semble la plus à même de reconnecter corps et esprit.
Cependant face à ces patients, il semble indispensable de créer une alliance solide: une injonction thérapeutique sans explication, une posture de « sachant » ne trouveront pas d’écho. Sans compter le besoin de contrôle, qui peut faire refuser tout traitement non expliqué et non pleinement compris.
Il est nécessaire de prendre en compte les capacités d’analyse et la curiosité intellectuelle de ces patients, et de prendre plus que jamais le temps d’expliquer, sans simplification ni vulgarisation, le déroulement de la thérapie. Il semble ici que le prestidigitateur doive expliquer ses trucs.
En outre, la distanciation, le sentiment d’une « mascarade », peuvent être un frein sérieux au laisser-aller dans la thérapie.
La motivation du patient, et sa pleine adhésion, sont indispensables, et passeront par sa pleine compréhension du processus.
» C’est en me reconnectant avec mon corps et en travaillant avec lui que j’ai soigné mon coeur et mon cerveau si je puis dire. Ces pratiques corporelles associées à des pratiques créatives régulières ont ouvert la voie à la thérapie Emdr […] Donc je pense que le haut potentiel peut être un avantage dans un parcours thérapeutique, la difficulté étant de rencontrer des thérapeutes avec qui l’alliance thérapeutique peut s’installer. »*
Le haut potentiel, malgré les difficultés qu’il peut entraîner, ne doit pas être considéré comme un handicap, une malédiction. Bien au contraire il peut s’avérer un formidable outil, un précieux allié, pour peu qu’il soit pris en compte.
Le choix de la thérapie reste large et fonction des affinités du patient: Emdr, sexocorporelle, méditation pleine conscience -avec le scan corporel notamment, excellent moyen de reconnexion-, sophrologie, etc..
Vers un haut potentiel érotique
Mais cette opposition corps/cérébralité pose encore une question : faut-il agir contre cet intellect surprésent ? Malgré lui ? Le faire taire ? Ne pourrait-il pas être au contraire le moyen d’accéder à une corporalité et une sexualité enrichie ?
Les énormes potentialités présentes: intelligence, imagination, analyse, curiosité, hypersensorialité, font de sérieux atouts pour l’expérience d’un haut potentiel érotique.
A condition d’être non plus combattues mais apprivoisées.
En effet, la sexualité humaine n’est pas que physiologique, la cognition y joue un rôle majeur, et les facteurs biologiques, prépondérants chez les autres animaux, n’ont plus leur caractère d’impériosité chez l’humain.
« La sexualité humaine est quasiment dissociée de la reproduction, et c’est le facteur cognitif et culturel qui apparaît comme prépondérant dans la structuration du développement sexuel. Le développement de la sexualité humaine est singulier, et se distinguerait de celui des autres mammifères par sa nature essentiellement culturelle » [29]
Ainsi, ce n’est plus l’impératif de reproduction, mais bien la construction d’un érotisme qui fonde la sexualité humaine. De ce fait, la cognition, la culture, le vécu individuel, les représentations jouent un rôle prééminent dans l’apprentissage du désir, du plaisir, et dans la construction de l’imaginaire érotique[30].
Or, dans l’étude présente, le sentiment de beaucoup de répondants d’être face à une « mascarade », une « pantomime », un »simulacre », d’une trivialité insupportable, et d’un intérêt peu convaincant (« le rapport sexuel est au même niveau qu’une partie de tennis : agréable de temps en temps »*) semble replacer la sexualité au niveau du coït animal, dénué de toute intellectualisation, et par conséquent indigne. Comme si tout ce qui concernait le corps ne pouvait en aucun cas être investi spirituellement.
Pourtant nombres d’artistes ont intellectualisé l’érotisme, et plusieurs courants spirituels lui donnent un rôle non négligeable.
Partant, on pourrait redonner à la sexualité ses lettres de noblesse, en y remettant toute sa dimension culturelle et en permettant à l’intellect d’y trouver également une satisfaction, afin que le patient ait, non plus l’impression de se livrer à de méprisables instincts biologiques, mais bien de découvrir sensuellement et intellectuellement un riche domaine inexploré.
Avec les outils intellectuels et sensoriels qu’il possède, nul doute que le champ est vaste et de ce fait, le potentiel érotique considérable.
Pistes de recherche
Étant donné l’ampleur du champ de la sexualité, toutes les pistes n’ont put être explorées dans cette étude.
Certaines auraient dû l’être, telles que les question de l’anéjaculation et de l’asexualité, évoquées par certains répondants dans les réponses ouvertes, et qu’il serait intéressant d’étudier plus avant.
D’autres apparaissent à la lecture des résultats et des réponses textuelles.
Ainsi les domaines des troubles du comportement alimentaire et des scarifications, au vu de l’importance des chiffres, mériteraient une exploration plus poussée.
La question des addictions également mériterait un focus, et notamment celle des dépendances affectives et sexuelles, déclarées chez 4,8% des répondants. Si ce chiffre paraît relativement raisonnable, les réponses textuelles des personnes concernées apportent cependant un éclairage intéressant:
« Je ne suis pas incarné et mon corps est extérieur à mes pensées. Le sexe me permet de sentir mon corps et de retrouver des sensations perdues. C’est sans doute pour ça que je suis accro. C’est un moyen pour moi d’enfin me servir de mon corps car sinon , il me sert uniquement de véhicule »*.
Ici le sexe comme moyen de reprendre contact avec son corps, de retrouver une sensorialité étouffée par l’intellect, de laisser s’exprimer une part de soi refoulée, qui s’exprime enfin avec une pointe de sauvagerie:
« dichotomie « muletier décomplexé versus philosophe inhibé » fatalement accentuée »*.
Parfois aussi étonnamment outil de censure des émotions:
« Sexualité utilisée compulsivement pour limiter les sur-réactions émotionnelles ainsi que la violence des changements métaboliques saisonniers »*.
Utilisée enfin comme nombre d’addictions pour atténuer l’angoisse, mais également pour échapper aux assignations étouffantes du haut potentiel:
» J’utilise la sexualité pour canaliser mon angoisse, très élevée de par mon haut potentiel.
J’utilise les liens affectifs et sexuels pour atténuer mes blessures narcissiques dues aux attentes très importantes de mon entourage, me valorisant essentiellement à travers la séduction et la sexualité […] J’attribue mon grand nombre de paraphilies à mon haut potentiel.
Mon expérience me pousse à croire que la proportion de personnes à haut potentiel parmi les pratiquants du bdsm et du fétichisme est plus haute que dans la population générale. De même pour les dépendants affectifs et sexuels. » *
Effectivement la question des paraphilies mériterait qu’une étude s’y arrête également, notamment celle des pratiques bdsm évoquées ici. En parcourant les forums de discussion d’adultes hp d’une part, et de pratiquants de bdsm d’autre part, les concepts de raffinement de l’acte, de mentalisation et de cérébralité reviennent fréquemment. Pour paraphraser une internaute hp, la nécessité d’être poussé à bout pour lâcher-prise, et pour se sentir exister, incarné, « justifie » le recours aux pratiques de domination-soumission, qui nourrissent également le besoin d’intellectualisation de l’acte.
Il serait donc effectivement intéressant d’examiner la proportion d’adultes hp dans la population pratiquant ces sexualités atypiques, ainsi que la proportion de pratiquants dans la population d’adultes haut potentiel.
Conclusion
Au terme de cette étude, il apparaît donc que les adultes hp présentent certains signes d’un rapport au corps conflictuel, distant, et une intellectualisation envahissante, qui laisse peu de place à l’expression de la corporalité.
La sensation de désincarnation semble majeure, même si certains répondants réussissent à garder intacte leur hypersensorialité, qui leur permet de lâcher-prise et de laisser les sens concurrencer pour un temps l’intellect. Cette hypersensorialité, alliée à une imagination permettant l’élaboration de fantasmes riches, permet à certains d’expérimenter une sexualité épanouissante, mais pour un plus grand nombre la cérébralité exacerbée gêne l’expérimentation d’une sexualité pleinement satisfaisante.
En occupant tout l’espace du Soi, et en posant un regard acerbe et critique sur les gesticulations triviales du rapport sexuel, l’intellect entrave la perception du désir et du plaisir.
Les thérapies corporelles, et les pratiques corps-esprit, semblent tout indiquées pour aider les éventuels patients à reprendre contact avec leur corporalité. Il paraît également nécessaire de permettre à l’intellect de trouver un intérêt et un épanouissement spirituel dans ce travail, au risque de voir la motivation disparaître rapidement.
Il semble ici indispensable de prendre en compte la particularité de ces patients, en communiquant sur le déroulement de la thérapie, en commentant et éclaircissant tous les points débattus: nourrir la curiosité intellectuelle avant de pouvoir laisser pleinement s’exprimer le corps en somme.
Une pleine adhésion à la thérapie, une alliance thérapeutique forte permettront alors d’aider le patient à s’autoriser à lâcher-prise et à écouter son corps.
En outre, une démarche d’éducation thérapeutique, replaçant la sexualité dans ses dimensions culturelle, cognitive voire spirituelle, pourrait faciliter une réconciliation corps-esprit.
Reste la question du diagnostic précoce, qui dans cette recherche ne semble pas impliquer un mieux-être corporel ni sexuel.
Si on peut supposer que les personnes diagnostiquées dans l’enfance présentaient des difficultés importantes qui ont pu provoquer cette recherche de diagnostic, il n’en reste pas moins que ce dernier n’a apparemment pas suffit à améliorer la situation.
Un accompagnement spécifique dans l’apprentissage de la gestion des émotions et des sensations semble tout indiqué pour que l’enfant haut potentiel puisse apprivoiser ses ressentis, et ainsi éviter l’inhibition sensorielle et intellectuelle. Ici encore les thérapies corporelles ont leur rôle à jouer.
Au vu de ces constatations, il ne semble pas inintéressant de continuer à se pencher sur ce sujet, afin d’affiner nos connaissances sur ce qui se joue dans le rapport au corps des haut potentiels, ceci afin d’accompagner au mieux ces patients vers une Santé Sexuelle épanouie, et vers une pleine expression de toutes leurs potentialités.
Bibliographie
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Ouvrages
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-Sartre, Jean-Paul, » L’Être et le Néant », Gallimard, Paris, 1943
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Articles de Presse:
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Forums Internet sollicités pour les questionnaires
– Forums privés mensa
– www.surdoue-adulte.forumactif.org
Annexes
Annexe I Table des illustrations. 43
Annexe I Table des illustrations
Source: http://www.apprendreaapprendre.com/reussite_scolaire/lintelligence-qi-1/
Figure 2 classement des HQI selon mensa. 7
Source: http://www.triplenine.org/WhatisTNS/AQuickWordonIQ.aspx
Figure 3 nouvelle version de l’échelle de Wechsler 8
Source: https://ecpa.fr/psychologie-clinique/test.asp?id=2046
Annexe II Questionnaire
[1] Desproges Pierre, Théatre Grévin, 1986.
[2] Magnié-Mauro MN. Le haut potentiel intellectuel : des particularités neurophysiologiques. ANAE – Approche Neuropsychologique des Apprentissages Chez L’enfant, ANAE/PLEIOMEDIA, 2012, Hauts potentiels des enfants : force ou faiblesse ? Identifier leurs aptitudes pour développer leurs talents. 24 (119), pp.457-462.
[3] Lubinski D. From Terman to Today: A Century of Findings on Intellectual Precocity. Review of Educational Research Month 201X, Vol. XX, No. X, pp. 1–45
[4] Lautrey, J (dir.) L’état de la recherche sur les enfants dits «surdoués », laboratoire Cognition et Développement, Paris V
[5] Op.Cit.
[6] Op Cit.
[7] Fanny Nussbaum, chercheur au Centre Psyrene de Lyon (2014), distingue deux profils de hauts potentiels : un profil « complexe », au QI hétérogène, et un profil « laminaire », au QI homogène.
[8] Liratni M, .Pry R, Profils psychométriques de 60 enfants à haut potentiel au WISC IV
8Terrassier J-C. Les enfants surdoués ou la précocité embarrassante. Collection Références. ESF éditeur. 6ème édition. 2004.
9 Terrassier J-C. Les dyssynchronies des enfants intellectuellement précoces. Conf Rennes psychiatres 2005
[11] Siaud Facchin J, L’Enfant surdoué, Odile Jacob, 2012
[12] Siaud-Facchin, J. Quand l’intelligence élevée fragilise la construction de l’identité : comment grandit-on quand on est surdoué ? , Développements, vol. 6, no. 3, 2010, pp. 35-42.
[13] Fumeaux P., Revol O. Le haut potentiel intellectuel : mythe ou réalité ? La revue de santé scolaire et universitaire, 2012 (18, 8-10)
[14] Grubar JC, Duyme M, Cote S. La précocité intellectuelle : de la mythologie à la génétique. Liège: Mardage; 1997.
14 Huon J. Le sommeil des sujets à quotient intellectuel élevé. Electroencephalography and Clinical Neurophysiology 1981;52S:128.
[16] Les témoignages anonymes seront signalés par un astérisque
[17] Extrait de l’émission les chemins de la philosophie, par Adèle van Reeth, du 22/12/2017 (La fatigue, ¾, Ode à la fatigue) de Sartre, l’être et le néant, P 530
[18] Paragraphe rédigé par l’Unité de Méthodologie Biostatistiques et Datamanagement du CHRU de Lille
[19] Gicquel L, Corcos M, Richard B, Guelfi JD. Automutilations à l’adolescence. Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris) Pédopsychiatrie 2007;37-216-J-10. 3. De Leo D, Heller TS. Who are the kids who self-harm? An Australian self-report school survey. Med J Aust 2004;181:140-4.
[20] Ayral S, Raibaud Y. Pour en finir avec la fabrique des garçons, vol. 1 et 2, MSHA, 2014
[21] Choquet et coll., Les élèves à l’infirmerie scolaire : identification et orientation des jeunes à haut risque suicidaire. Inserm.2001
[22] Pommereau, X. Les violences cutanées auto-infligées à l’adolescence , Enfances & Psy, vol. no 32, no. 3, 2006, pp. 58-71
[23] Le Breton, D. Les scarifications comme actes de passage , L’information psychiatrique, vol. volume 82, no. 6, 2006, pp. 475-480
[24] D Keyes, Des Fleurs pour Algernon, p 87, j’ai lu, 1972
[25] Céline Ronquetti, Les sapiosexuels, ces obsédés du QI , Le Soir.be, 26 mars 2015
[26] Gauvrit Alain. le complexe de l’albatros, l’inhibition intellectuelle chez l’enfant intellectuellement précoce. Se défendre ou s’interdire ?
[27] Albert Camus, Le Mythe de Sisyphe, Gallimard, 1942
[28] Bost, C. (2011). Différence & souffrance de l’adulte surdoué: Vuibert, pratique, 205 p.. Revue internationale de psychosociologie, vol. xvii,(41), 363-364
[29] Wunsch S. (2016). Principaux facteurs, contextes et variations du développement sexuel humain. Une synthèse transculturelle et transdisciplinaire. 2e partie : modélisation. Sexologies. 10.1016/j.sexol.2016.07.002.
[30] le développement sexuel « semble plutôt être multifactoriel, et dépend des facteurs physiologiques, des activités autoérotiques, des jeux et activités avec des partenaires, du vécu émotionnel, des représentations cognitives, et, surtout, du contexte culturel » (Op.Cit.)