Planète-Douance

Guide santé du cerveau Alptis

Alptis, l’assurance en mode associatif

La force d’une association indépendante pour assurer votre protection

Depuis toujours, notre vocation est de négocier, avec nos partenaires assureurs, le meilleur rapport qualité/prix pour les services et garanties que nous proposons à nos adhérents.

Sans but lucratif, le modèle économique développé depuis plus de quarante ans par Alptis est indépendant et équilibré.

Pour nous, c’est l’intérêt de nos adhérents qui compte avant tout ! L’assurance ne s’arrête pas au produit qu’on vend. La mission d’Alptis est d’accompagner chacun de ses adhérents, tout au long de sa vie, en lui permettant d’être acteur de sa santé.

Chaque année, les 600 adhérents bénévoles d’Alptis organisent près de 400 ateliers de prévention santé, partout en France, sur des thèmes très variés : découverte de la sophrologie ou de la marche nordique, initiation aux premiers secours… Tous nos adhérents peuvent y participer gratuitement.

De même, avec le site internet Nature en Tête et une gamme de formations courtes et ouvertes à tous, Alptis propose à chacun d’utiliser des solutions naturelles (aromathérapie, phytothérapie, gemmothérapie) face aux petits maux du quotidien.

Notre raison d’être : agir ensemble, pour que la vie de chacun soit bien protégée.

Guide « La bonne santé du cerveau »

Tous acteurs de notre santé !

Pour Alptis, la prévention santé est une priorité. Notre objectif est de permettre à chacun de répondre à des questions aussi simples qu’essentielles :

Que faire dans ma vie quotidienne pour optimiser mon bien-être et celui de mes proches ?

Quels comportements adopter pour être en meilleure santé dès aujourd’hui, mais aussi pour mieux vieillir demain ?

En savoir plus sur cet incroyable organe

Après avoir travaillé sur la santé du cœur (NDLR : le précédent guide de notre collection « Comprendre pour agir »), nous avons choisi de nous intéresser à celle du cerveau.

Avec l’aide d’experts, et notamment de Pierre-Marie Lledo, directeur du département de neuroscience à l’Institut Pasteur, nous vous proposons de découvrir cet organe incroyable, qui pèse en moyenne 1 300 grammes et qui se compose d’environ 80 milliards de neurones à la naissance. Vivant et dynamique, notre cerveau présente une grande plasticité, ainsi qu’une capacité permanente d’adaptation.

La santé de notre cerveau… dépend aussi de nous !

Par notre mode de vie, notre alimentation, nos activités, nous pouvons agir au quotidien pour améliorer la vitalité de notre cerveau et lutter contre son vieillissement. C’est une excellente nouvelle, et l’objet de ce guide est de vous apporter de nombreux conseils pratiques en matière de prévention. Ce projet collaboratif a été conçu avec l’aide d’un groupe de travail composé d’adhérents et animateurs régionaux bénévoles.

Je vous invite à découvrir ce guide et je vous en souhaite une lecture active.

À votre santé !

Georges Coudert, président d’Alptis

Sommaire

  1. Toute l’humanité dans 1 500 cm3

Un cerveau qui nous vient de notre espèce

Les humains ne naissent pas finis, surtout côté cerveau ! La plasticité du cerveau, une chance !

En constante construction Branché sur le corps et les sens Un cerveau façonné par la vie

Cerveau féminin/masculin : une idée fausse à oublier Vous êtes cerveau gauche ou cerveau droit ?

Interview de Pierre-Marie Lledo, directeur du département de neuroscience à l’Institut Pasteur.

Comment bien alimenter mon cerveau ? 

Un organe roi

Les nutriments indispensables

Les huiles et les poissons riches en oméga-3 Les mauvaises alliances

Les bons aliments

Interview de Jean-Marie Bourre, spécialiste de la biochimie du cerveau.

S’activer et débrancher 

Haro sur les accélérateurs du vieillissement La méditation et le yoga, sources de jouvence Des activités bénéfiques accessibles à tous Entretenir ses sens et le plaisir !

Interview de Pascal Douek, médecin du sport, micronutritionniste, spécialiste de la prévention du vieillissement.

  1. La clé de la longévité

Le vieillissement du cerveau sain

Qu’est-ce qu’une maladie neurodégénérative ? Quelle prévention ?

Comment compenser la maladie ?

Interview de Maï Panchal, directrice scientifique de la fondation Vaincre Alzheimer.. 24

  1. Le cerveau de demain

Notre mémoire change avec les outils Numérique : quel effet sur notre mémoire ? Utilisons notre cerveau pour être plus créatifs !

Interview de Pierre-Marie Lledo, directeur du département de neuroscience à l’Institut Pasteur.

Toute l’humanité dans 1 500 cm3

Tous nés pour s’adapter

Notre espèce, Homo sapiens, apparue il y a environ 250 000 ans, doit sa réussite exceptionnelle à sa capacité à s’adapter dans un environnement changeant. Notre cerveau est l’organe principal de cette adaptation: à la naissance, il n’est pas fini et peut tout apprendre, ce qui le façonne tout au long de la vie.

Un cerveau en bonne santé, c’est comment ?

De belles images en couleurs : le cerveau apparaît souvent comme un Meccano avec des pièces aux fonctions bien identifiées. La réalité est plus complexe, car le cerveau est vivant et mouvant. Il fonctionne et se réorganise en permanence.

Comment le cerveau devient… ce qu’on est

Chaque individu se fabrique un cerveau au fonctionnement particulier. Et chacun puise à sa manière dans ses ressources pour répondre aux problèmes. Bonne nouvelle !

L’observation du cerveau ruine les préjugés sexistes et le « bon sens » simpliste : nous sommes tous égaux et tous différents !

Les australopithèques, apparus il y a 4 millions d’années, se sont contentés d’un cerveau plus petit et moins développé que le nôtre pendant des millions d’années. Quatre cents centimètres cubes étaient suffisants dans un monde stable. Des fruits en abondance et la chair d’animaux morts pour les protéines : pas besoin d’inventer !

Puis un certain nombre d’événements climatiques ont poussé nos ancêtres humains à sortir de leur berceau africain et à parcourir de nouveaux territoires. Moins puissants que les fauves, moins rapides que les gazelles, ils ont dû leur survie au développement de leur intelligence.

Les hominidés d’il y a environ 1,5 million d’années ont inventé le feu pour faire reculer la nuit noire et les prédateurs, et aussi pour cuire les aliments et les partager. Il leur a fallu pour cela un cerveau un peu plus gros, de 700 à 1 300 cm3.

Alors que des milliers d’animaux ont prospéré un temps puis ont disparu quand l’environnement changeait, Homo sapiens a su modifier le monde qui l’entourait, grâce à son cerveau de 1 300 à 1 500 cm3. Il a inventé des cultures, une vie sociale complexe, ce qui lui a permis d’essaimer sur l’ensemble de la planète.

Alors qu’un poulain se dresse sur ses pattes à peine né, les primates, et les humains en particulier, naissent très dépendants, incapables de se débrouiller seuls pour se déplacer et se nourrir.

Ce grave handicap est une chance : les adultes doivent développer très fortement l’attention, le soin à l’autre pour protéger leurs bébés. Et les petits ne peuvent survivre que s’ils sont branchés sur les informations qui les entourent, avides d’apprendre et de devenir autonomes. Notre cerveau est le fruit de ces particularités.

Résultat : la transmission par l’éducation, la culture et l’expérience individuelle est plus importante chez les humains que le bagage génétique qui nous vient de notre histoire en tant qu’espèce.

La plasticité du cerveau est sa capacité à être transformé, jusque dans sa structure, par les apprentissages.

Les recherches actuelles accumulent les résultats sur cette étonnante construction au cours de la vie. Grâce à cette caractéristique, le cerveau peut se réparer, ce qui donne beaucoup d’espoir à la médecine.

Plus importante encore que la création de neurones : la création de synapses (les connexions entre les neurones). En grandissant, en apprenant, le cerveau humain se construit et fabrique des circuits cérébraux uniques. L’essentiel du cerveau est structuré dans l’enfance et l’adolescence, mais le processus de réorganisation dans le cerveau ne s’arrête jamais.

Lorsque le cerveau est lésé, du fait d’un accident vasculaire cérébral par exemple, il arrive que certaines fonctions du cerveau (mémoire, parole) soient touchées. Si certaines connexions sont détruites, d’autres connexions peuvent se créer pour aboutir au même résultat, mais dans une autre localisation et avec des chemins différents.

Notre cerveau se compose de quelque 80 milliards de neurones à la naissance. Ces neurones créent des milliards de connexions pendant les trois premières années. Vers 4-5 ans, seule une partie de ces connexions sont sélectionnées et subsistent.

Le cerveau améliore ensuite ses performances grâce à la myélinisation. Les fibres conductrices de l’information se recouvrent d’une sorte d’isolant, la myéline, qui rend la circulation plus rapide. La maîtrise et la rapidité des gestes et des raisonnements croissent jusqu’à la totale maturité, vers 25 ans.

On a longtemps cru que la production des neurones s’arrêtait peu après la naissance. On sait désormais que des neurones naissent au cours de la vie dans plusieurs régions du cerveau. Ce phénomène est nommé « neurogénèse ».

En mars 2019, des scientifiques espagnols ont montré que de nouveaux neurones étaient apparus dans l’hippocampe de personnes de 90 ans. Cette structure du cerveau joue un rôle important dans l’attention, la mémoire et l’orientation.

Dès le 19e siècle, des blessés de la tête qui ont survécu ont fait comprendre aux médecins qu’une lésion, selon sa localisation, pouvait provoquer une aphasie, une incapacité à mémoriser les événements récents, ou une paralysie, par exemple. Ils en ont déduit que le cerveau est composé de plusieurs aires qui correspondent à des fonctions variées. C’est ainsi que sont nées des cartographies du cerveau.

L’encéphale est associé aux fonctions supérieures (contrôle des mouvements, réflexion, langage). Il comprend les deux hémisphères, droit et gauche, qui communiquent par un faisceau de fibres nerveuses, le corps calleux.

Le cortex cérébral est la fine couche à la surface de l’encéphale, on l’appelle aussi la matière grise. Les deux tiers du cortex sont repliés dans des circonvolutions qui augmentent sa surface et donc le nombre des cellules nerveuses.

Le cortex est divisé en zones parmi lesquelles :

Le rhombencéphale est à la manœuvre pour des actions non volontaires. Il contrôle le rythme respiratoire, l’activité cardiaque et le taux de glucose dans le sang. En son sein, le cervelet intervient dans la coordination des mouvements.

Sans les remettre en cause, les recherches actuelles relativisent l’importance des aires très spécifiques d’une fonction, au nombre d’une centaine. On observe des gradations, des mélanges. Les fonctionnalités de la mémoire sont disséminées partout. Conclusion : les connexions entre les différentes aires se révèlent aussi importantes que les localisations elles-mêmes. Le cerveau n’en fait qu’à sa tête !

Un des grands apports de l’imagerie cérébrale par IRM est d’avoir révélé la grande variabilité d’un individu à l’autre. Pour une même performance (en calcul mental ou au jeu d’échecs, par exemple), chacun a sa propre façon d’activer ses neurones et d’organiser son raisonnement.

Il n’y a pas une voie unique pour le raisonnement, l’activation de la mémoire, la résolution d’un problème. C’est une grande chance. En cas de détérioration d’une de ces voies (lésion cérébrale, maladie, grand âge), une autre peut s’ouvrir.

Nos expériences sont inscrites et lisibles grâce à l’imagerie cérébrale. Ainsi, lorsqu’un pianiste professionnel bouge ses doigts, les zones dédiées à l’audition s’activent simultanément. Et lorsqu’il entend un son, les zones dédiées au mouvement se mettent en action.

Une expérience célèbre a porté sur les chauffeurs de taxi londoniens. Leur hippocampe, qui commande la mémoire à long terme et la navigation spatiale, a été comparé à celui de volontaires de même sexe, de même âge et de même niveau d’études. Il apparaît que leur hippocampe est beaucoup plus dense en matière grise, et cette modification est plus marquée avec les années d’expérience !

Le fait que chaque cerveau soit structuré en grande partie en fonction de l’expérience de chacun ruine beaucoup de préjugés, et c’est tant mieux.

Si des statistiques font apparaître que seules 23 % de filles s’orientent vers les classes préparatoires scientifiques des grandes écoles, la biologie n’y est pour rien. Il faut interroger l’éducation, qui n’encourage pas autant les filles que les garçons dans cette voie.

Une expérience très connue le confirme : si on dit à un groupe mixte d’enfants de 11-13 ans « nous allons faire un test de géométrie », les garçons obtiennent de meilleurs résultats.

Si on leur dit à tous, pour le même exercice, « faisons du dessin », les filles sont meilleures… Pourquoi ?

Les filles vont plus facilement perdre confiance en elles et en leurs capacités, notamment en matière de sciences et de mathématiques, et leurs résultats vont en pâtir.

Quant au fameux sens de l’orientation, qui serait l’apanage des mâles? Il suffit de rappeler que les championnes de cette discipline sont des femmes dans les régions d’Afrique où elles parcourent des dizaines de kilomètres (sans se perdre) pour cueillir des fruits et rapporter de l’eau !

VOUS ÊTES CERVEAU GAUCHE OU CERVEAU DROIT ?

Certains utiliseraient préférentiellement leur hémisphère gauche (rationnel) alors que d’autres fonctionneraient surtout avec le cerveau droit (émotionnel). Cette fable est née au 19e siècle dans l’Angleterre victorienne, où tout était bon pour trouver des explications biologiques aux inégalités.

On avait compris qu’une lésion de l’hémisphère gauche provoque des troubles de la parole, alors qu’une blessure de l’hémisphère droit entraîne des troubles de l’orientation et de la reconnaissance des visages. Selon les catégories de l’époque, on a mis au sommet de la hiérarchie le cerveau gauche, rationnel, civilisé et masculin. Et en dessous, le cerveau droit, émotionnel, animal et féminin ! Nous savons aujourd’hui que les émotions et le raisonnement sont intimement liés…

Alptis : Que faut-il retenir des nouvelles avancées de la recherche ?

Pierre-Marie Lledo : La dynamique ! Le cerveau abrite

un chantier permanent. Nous sommes capables de produire de nouveaux neurones tant que nous sommes confrontés à de l’inconnu. Cela ne passe pas nécessairement par des aventures rocambolesques : il suffit de faire des rencontres, de voir de nouveaux visages pour alimenter notre mémoire. Organe du changement, le cerveau s’en nourrit. Il ne craint pas les ruptures mais la routine et l’ennui, qui sont destructeurs.

Alptis : Le cerveau peut s’ennuyer ?

Pierre-Marie Lledo : L’ennui défini comme l’absence d’émotions est délétère pour le cerveau. A contrario, pensez aux apprentissages. Pour qu’un chien apprenne à saluer, il faut lui mettre de la viande dans la gamelle, pas des clous ! Et quand un enseignant ne sait pas transmettre des émotions en même temps que des informations, ne formulant pas des encouragements, ça ne marche pas. Une autre belle illustration : en 2016, le champion du monde de go a perdu trois fois de suite contre un ordinateur. Écœuré, en colère, il a joué la quatrième manche avec le cerveau en ébullition, loin de sa concentration habituelle, et il a gagné !

Alptis : Il ne faut donc pas opposer raisonnement et émotions ?

Pierre-Marie Lledo : Le cerveau fait fi de la plupart de nos catégories. Branché sur les signaux du corps et des sens, qui provoquent des émotions, le cerveau innove d’autant mieux. Des volontaires ont été privés d’informations visuelles pendant plusieurs jours et on leur a expliqué qu’ils en tireraient des satisfactions extraordinaires. En phase de test, ils ont su flécher leurs réseaux de neurones normalement dédiés à la vision vers la reconnaissance tactile. Leurs performances étaient très supérieures à celles de ceux qui n’avaient pas eu cette promesse de plaisir !

Pour nourrir cet organe gourmand et vorace, il faut aussi consommer de bonnes graisses, ainsi que des protéines animales ; tout en veillant à conserver une alimentation équilibrée. Et veiller à consommer suffisamment d’oméga-3, que l’on trouve facilement dans les poissons et l’huile, mais pas n’importe lesquels !

PARTIE 2 . Comment bien alimenter mon cerveau ?

UN ORGANE ROI

Notre cerveau est l’organe le plus gras de notre corps, après les tissus adipeux. Il a des besoins énormes en énergie, et sans une alimentation suffisamment riche en graisses, qui assurent sa structure, il fonctionne moins bien. Organe le plus protégé de l’organisme, le cerveau est prioritaire : il va se servir, au risque de fragiliser d’autres organes.

LES NUTRIMENTS INDISPENSABLES

Les oméga-3 sont indispensables au développement du cerveau du fœtus, du nourrisson et de l’enfant (croissance) puis à l’âge adulte (entretien). Un manque de ces nutriments, surtout au début de la vie, affecte le fonctionnement cérébral.

L’iode est à l’origine des processus de croissance et de maturation cellulaires et contribue au développement cérébral. Une carence lors du développement du fœtus provoque un déficit intellectuel et des troubles psychomoteurs. On trouve de l’iode dans les produits de la mer (algues, fruits de mer, poisson…), mais aussi un peu dans les produits laitiers. Sans oublier le sel iodé.

La vitamine B12 participe à la fabrication de certains neuromédiateurs et protège les cellules nerveuses.

En plus de favoriser la formation des cellules et des acides gras, elle préviendrait l’atrophie du cerveau et les pertes de mémoire.

On la trouve dans les produits animaux (poissons, bœuf, veau, œufs…), d’où des carences possibles chez les végétaliens.

Alterner le trio huile de lin, de colza et de noix est la meilleure façon d’en consommer.

en remplacer une par de l’huile de colza permet de couvrir les besoins. On peut aussi penser aux aliments composés, comme les margarines à base d’huile de colza.

Les poissons (surtout ceux qui sont gras) et fruits de mer sont riches en oméga-3. On recommande de consommer deux fois par semaine : sardine, maquereau, hareng, saumon.

À noter : la sardine et le maquereau sont les moins chers et les plus riches !

La biodisponibilité (absorption des nutriments et donc des atouts nutritionnels au niveau de l’intestin) fait entrer les aliments dans une sorte de compétition. C’est pourquoi il faut éviter de marier :

Le carpaccio et la choucroute : car le citron, le vinaigre

ou la fermentation du chou rendent les protéines plus digestes. Les fromages très affinés, dont les protéines se digèrent mieux. Le boudin noir, pour le fer. À savoir : la viande est plus intéressante quand elle est consommée avec plusieurs familles de légumes.

Alptis : Quand vous avez publié La diététique du cerveau,

il y a vingt ans, l’importance de l’alimentation pour le cerveau était-elle sous-estimée ?

Jean-Marie Bourre : Oui, même si on connaissait bien le rôle de l’iode, qui peut provoquer un déficit intellectuel majeur en cas de carence. J’ai montré que le cerveau contient beaucoup d’oméga-3 et qu’il en a absolument besoin, via l’alimentation, surtout au début de la vie pour se construire, et ensuite pour assurer son bon fonctionnement.

Alptis : Pourquoi sommes-nous souvent en manque d’oméga-3 ? Jean-Marie Bourre : La chasse aux aliments gras a joué un rôle. Et aussi le fait que nos besoins caloriques ont diminué :

en mangeant moins, il faut faire plus attention à éviter  les carences. Il y a aussi des changements dans la valeur nutritionnelle de certains aliments. La teneur en oméga-3 du saumon d’élevage a été divisée par quatre en dix ans à cause de sa nourriture ! À cause du risque de mercure, on a déconseillé les poissons de mer aux femmes enceintes, ce qui a créé un danger bien réel de déficit en iode et en oméga-3, avec pour conséquence des altérations mesurables sur le QI des enfants. Par ailleurs, notre alimentation moderne est souvent trop riche en oméga-6, ce qui crée un déséquilibre. Mais le problème majeur reste le déficit alimentaire en oméga-3.

Alptis : Pourquoi la supplémentation est-elle moins efficace qu’une alimentation équilibrée ?

Jean-Marie Bourre : Les compléments alimentaires peuvent être un secours pour les femmes enceintes et allaitantes, pour ceux qui suivent un régime restrictif et pour les personnes âgées.

Les autres ont intérêt à chercher les oméga-3 dans la nourriture, et par exemple dans le poisson, qui apporte en outre l’iode et les vitamines D et B12, ainsi que des protéines de qualité.

Alptis : Pourquoi faites-vous l’éloge des trois repas et du menu complet ?

Jean-Marie Bourre : Le jeûne dérègle les horloges biologiques du cerveau. Et contrairement à ce qu’on pense, le dîner ne doit pas être léger car pendant la nuit, si l’on est en hypoglycémie, la mémorisation s’effectuera moins bien. Alors consommez des sucres lents (du pain, des pâtes) avant de vous coucher !

  1. S’activer et débrancher

Actif 24 heures sur 24, le cerveau ne s’arrête jamais. Il se nourrit des stimulations sensorielles, intellectuelles, émotionnelles que procurent le travail, les relations sociales, les loisirs et les passions. Ce sont les meilleures crèmes anti-âge! Mais il faut laisser au cerveau le temps

d’archiver, de mémoriser, d’apprendre. Il faut parfois limiter les activités trop dirigées et volontaristes. Et éviter les excès, en particulier lorsque le sommeil, indispensable à notre équilibre, est menacé !

Le sommeil de mauvaise qualité, le stress et la pollution sont aussi régulièrement accusés de provoquer des troubles cognitifs, émotionnels et mnésiques.

Le manque de sommeil cause des dégâts sur les performances cérébrales, il génère du stress, qui peut mener jusqu’à la dépression par un effet de cascade.

La dépression est une maladie à combattre car dangereuse pour le cerveau et la longévité. Les antidépresseurs ne peuvent suffire si le mode de vie qui est à l’origine n’est pas remis en cause.

LA MÉDITATION ET LE YOGA, SOURCES DE JOUVENCE

Selon une étude de l’Inserm en 2017, méditer ralentit le processus de vieillissement cérébral. En cause, une activité plus importante dans deux régions du cortex frontal qui sont mieux préservées car plus stimulées. Les mêmes mécanismes sont observés avec le yoga.

Se mettre sur off pour se recentrer sur soi réduit stress, anxiété, émotions négatives et problèmes de sommeil.

De quoi préserver des effets délétères de l’âge et améliorer ses performances cognitives.

La marche, connue pour ses bénéfices sur le système cardiovasculaire, favorise aussi l’irrigation du cerveau grâce à un processus physiologique : l’effet pompe lorsqu’on pose le pied à terre.

Le chant, l’apprentissage ou la pratique d’un instrument, être dans une chorale, sont des activités qui font appel à des connexions de neurones différentes de celles qu’on utilise au quotidien, en favorisant les échanges d’informations entre les deux hémisphères cérébraux. La mémoire est stimulée.

La danse est une activité physique mais demande aussi de mémoriser des chorégraphies et de coordonner ses mouvements. C’est une activité très complète. Dans les danses de couple (tango, salsa…) ou de groupe s’ajoute la dimension relationnelle, importante pour garder son cerveau connecté au monde.

Une baisse de 36 % du risque de démence est constatée chez les personnes qui jardinent quotidiennement. La vue des plantes diminue les symptômes physiologiques liés au stress (tension musculaire, pression artérielle, rééquilibrage du rythme cardiaque…). Pas de jardin ? Rapprochez-vous de votre municipalité et des associations environnantes pour vous occuper d’un jardin partagé !

Les troubles sensoriels de la vue et de l’audition sont générateurs de déclin de la mémoire car ils finissent par isoler. Il ne faut jamais tarder à compenser les pertes auditives et visuelles dès qu’elles apparaissent. Ne négligez pas l’importance du dépistage précoce des troubles auditifs et visuels à partir de 50-60 ans !

Jardiner diminue le risque de démence de 36%

Travailler pour son cerveau… avec plaisir ! Faire des mots croisés, jeux d’énigmes et casse-tête, oui, mais seulement si cela vous fait envie.

Alptis : Pourquoi faut-il à la fois s’activer et « débrancher » pour conserver un cerveau en bon fonctionnement ?

Pascal Douek : L’activité physique a de grandes vertus qu’on ignore souvent : marcher, danser, courir, tout est bon pour oxygéner son cerveau. L’exercice augmente le flux sanguin et lui fournit plus de nutriments. Cela augmente les capacités de concentration. La preuve, c’est qu’en marchant on trouve des solutions, on prend des décisions ! On a mesuré que la pratique quotidienne de la marche réduit de 38 % le risque de démence.

L’écueil est l’excès : quand on finit par considérer que le sommeil est une perte de temps ! Ou l’hyperstimulation sensorielle (smartphone, tablette et autres écrans) avant de se coucher, qui repousse l’heure d’endormissement et altère la qualité de sommeil. Même chose pour le sport, il vaut mieux le pratiquer vers 18-20 heures, puis dîner, et se détendre avant de se coucher. Débrancher des contraintes et des machines permet aussi de se rebrancher sur l’instant présent, sur son propre corps, à travers la méditation par exemple. Attention cependant à ne pas faire de la méditation ou du yoga une activité supplémentaire dans un planning qui ne laisse aucun répit. Tout le bénéfice serait perdu !

Alptis : Pourquoi les activités sociales sont-elles les meilleures ? Pascal Douek : Il faut absolument lutter contre l’appauvrissement des contacts sociaux ! Sans sollicitation du monde extérieur, sans échanges quotidiens, les sens sont moins stimulés, ce qui peut faire glisser vers la perte d’autonomie. Vivre seul rime rarement avec bien-être et qualité de vie. Pour bien vieillir, l’important est de rester curieux, ouvert aux autres, aux choses qui nous entourent, même si cela dépend aussi de son caractère. Cela peut passer par l’activité associative et bénévole. Aider son prochain, soutenir un proche, un voisin, réduit son propre stress, et donc améliore le fonctionnement cérébral. Émotions positives à la clé, et meilleure santé en général.

  1. La clé de la longévité

Notre cerveau vieillit comme nos autres organes. Et comme un muscle, il perd de ses qualités et diminue d’autant plus qu’il est moins sollicité.

Cette évolution normale ne nous empêchera jamais de parler, de nous souvenir, de réfléchir, d’inventer, d’aimer. En revanche, certaines maladies spécifiques peuvent attaquer et détruire une partie des fonctions du cerveau.

Les comprendre et les soigner est l’objectif de milliers de chercheurs à travers le monde.

L’atrophie cérébrale (diminution du volume du cerveau) est inscrite dans le vieillissement cérébral normal.

La perte est d’environ 2 % par décennie mais sans rapport avec la perte de fonctions intellectuelles. Nous perdons tous 10 % du poids de notre cerveau entre 50 et 100 ans.

Il faut différencier troubles légers de la mémoire liés à l’âge, au stress, à la fatigue, à un choc ou à une anesthésie générale, et la maladie d’Alzheimer, qui provoque des troubles du langage, des comportements répétitifs ou encore des troubles de la reconnaissance de soi.

Si les maladies neurodégénératives et leurs troubles cognitifs touchent essentiellement les plus de 65 ans, elles ne constituent pas le vieillissement normal de la mémoire.

C’est une pathologie progressive qui affecte les cellules nerveuses du cerveau, voire le système nerveux plus globalement, et qui entraîne des pertes cognitives, motrices ou perceptives. Son origine est multifactorielle.

Parmi les maladies du cerveau qui affectent les personnes âgées, on peut citer les plus connues :

 QUELLE PRÉVENTION ?

Une étude de 2014 a estimé que plus de 30 % des cas d’Alzheimer en Europe pourraient être évités en réduisant les facteurs de risque suivants : diabète, obésité/sédentarité, cholestérol, dépression, tabagisme, hypertension artérielle et bas niveau d’éducation. Cela vaut pour les maladies dégénératives en général.

Les solutions médicales : s’assurer un suivi des risques vasculaires, d’hypercholestérolémie, se faire aider pour arrêter de fumer… Par exemple, une personne suivie pour hypertension artérielle réduit de 40 % ses risques de déclin cognitif.

La lutte contre l’isolement social. Souvent aggravé par l’isolement sensoriel (troubles de la vue ou de l’ouïe), il augmente les risques de déclin cognitif.

COMMENT COMPENSER LA MALADIE ?

Tous les malades ne sont pas égaux devant les maladies neurodégénératives. Ceux qui ont le plus utilisé leur cerveau, qui se sont cassé la tête (aussi bien sur un problème de mathématique que sur la culture d’un champ) ont constitué des ressources précieuses. Elles sont surdimensionnées pour les activités banales mais se révèlent utiles quand le cerveau fonctionne moins bien.

Cette réserve sert à pallier les détériorations cognitives qui apparaissent avec la vieillesse, mais aussi les prémices des maladies dégénératives, notamment la maladie d’Alzheimer. Quelqu’un qui prend l’habitude de mémoriser les noms des rues, par exemple, pourra se débrouiller seul longtemps, même avec des difficultés d’orientation.

Chacun a le pouvoir de stimuler son cerveau afin d’augmenter sa réserve cognitive, même après l’adolescence, car elle sera marquée par l’activité cérébrale qu’on aura pratiquée tout au long de sa vie !

Alptis : Où en est-on dans la recherche sur la maladie d’Alzheimer ?

Maï Panchal : On sait que la maladie se développe silencieusement presque vingt ans avant l’apparition des premiers symptômes.

On sait que 30 % des cas seraient liés à une synergie de facteurs de risques modifiables. Par exemple, une mauvaise qualité de sommeil peut contribuer à l’accumulation des plaques amyloïdes (une lésion spécifique de la maladie d’Alzheimer) dans le cerveau. À l’inverse, travailler sa réserve cognitive retarde ce mécanisme.

Alptis : À quoi sert cette « réserve cognitive » ?

Maï Panchal : Un haut niveau d’éducation et beaucoup de responsabilités à gérer au cours de sa vie nourrissent la réserve cognitive. On y puise pour compenser l’effet des lésions cérébrales, ce qui retarde l’apparition des symptômes. Ainsi le président Jacques Chirac a pallié longtemps la maladie. Cette réserve cognitive se développe surtout jusqu’à 25 ans, mais on peut la développer tout au long de sa vie surtout grâce aux interactions sociales, plus efficaces que les activités solitaires comme les mots croisés ou la lecture. L’idéal, c’est d’aller au théâtre, au cinéma avec des amis et surtout d’en discuter après en défendant son avis !

Alptis : Quels sont les traitements en cours ?

Maï Panchal : Plus de 100 molécules sont en cours d’essai clinique. Nous n’avons pas encore de médicament curatif, mais la prise en charge médicale progresse. Une étude épidémiologique finlandaise multidomaine a démontré que les participants ayant suivi un programme alimentation, activité cognitive et activité physique voyaient leurs fonctions exécutives et leur traitement de l’information améliorés de 25 %.

La prévention est un succès. Depuis 2010, le nombre de nouveaux cas de maladie d’Alzheimer diminue grâce à une meilleure prise en charge des facteurs de risque, notamment cardiovasculaires.

Le cerveau de demain

La révolution digitale va-t-elle nous rendre dépendants, incapables de mémoriser ce que l’on trouve facilement en quelques clics? Notre façon de rechercher des informations, d’écrire, de raisonner sera-t-elle profondément modifiée par les nouvelles technologies, actuelles et à venir ?

Probablement, oui… Mais si, grâce aux béquilles numériques, libérés de tâches de peu d’intérêt, nous devenions plus créatifs ?

Nous n’avons plus besoin de retenir des numéros de téléphone, et, de fait, peu de gens les mémorisent alors qu’il était courant de le faire il y a moins de vingt ans.

Est-ce si grave ? Pas sûr !

Dans les sociétés qui n’écrivent pas, la mémoire des récits du passé et des légendes est proprement phénoménale. Certains membres de la communauté apprennent par cœur l’équivalent de nombreux volumes imprimés pour en transmettre le contenu. La mémoire visuelle des pasteurs est aussi impressionnante : ils sont capables de reconnaître leurs bêtes entre mille, sans les marquer.

Lorsque l’écriture a été inventée, vers 3 500 avant J.-C. dans l’Irak actuel, elle est devenue très utile pour suppléer la mémoire humaine. On pouvait, en écrivant, consigner le nombre de chèvres, les quantités de blé produites, et des heures de récits poétiques ou historiques sans tout retenir. Et, logiquement, la mémoire des humains qui ont bénéficié de l’écriture a perdu certaines de ses performances. Mais l’écriture était un gain bien plus important pour l’humanité, car elle représente une extension gigantesque de la mémoire collective. Les livres contiennent beaucoup plus que la mémoire des humains, même extrêmement entraînés !

Le numérique a augmenté et surtout rendu disponibles presque instantanément des informations qu’il aurait fallu, ou mémoriser, ou chercher dans des livres, des cartes, des encyclopédies. Les effets sur ce que nous faisons de notre mémoire sont incontestables dans la mesure où notre téléphone, notre agenda électronique, notre GPS mémorisent à notre place. Et alors ? Il serait faux de dire que le digital change notre cerveau, il modifie simplement notre façon de l’utiliser. Au lieu de mémoriser la suite des rois de France, les étudiants mémorisent la façon la plus rapide de trouver la réponse !

Et si l’humanité régressait demain au niveau des chasseurs- cueilleurs, les adolescent(e)s, au lieu d’exercer leurs talents sur des jeux vidéo, deviendraient des cracks du repérage des traces d’animaux et de l’orientation dans la nature, car nos capacités d’adaptation sont intactes en tant qu’espèce !

UTILISONS NOTRE CERVEAU POUR ÊTRE PLUS CRÉATIFS !

Le temps épargné dans la mémorisation de ce qui est facilement accessible sur le Web, c’est du temps gagné pour la créativité, l’invention, l’échange ! Et, bonne nouvelle, nos capacités d’apprentissage perdurent toute la vie. Il est plus facile d’apprendre le violon dans l’enfance, mais rien n’interdit de commencer à 60 ans. Sous l’action de l’apprentissage, de nouvelles cellules cérébrales vont naître, de nouvelles connexions vont être établies ou renforcées, pendant que d’autres (pas ou peu utilisées) vont disparaître.

Alptis : Le digital, une révolution pour le cerveau ?

Pierre-Marie Lledo : Le digital révolutionne notre façon d’utiliser notre cerveau et de mémoriser. Notre mémoire sémantique, celle qui associe 1515 et Marignan, est remplacée par une mémoire procédurale. Lorsqu’on demande quand a eu lieu Marignan, une personne familière du digital saura faire la bonne requête pour trouver. Si on lui pose la même question quelques jours plus tard, elle aura peut-être oublié le résultat de la recherche sur Marignan, mais stocké dans sa mémoire la stratégie utilisée pour trouver. En soi, cela n’a rien d’alarmant, déléguer de la mémoire à des objets connectés, cela oblige à utiliser son cerveau pour autre chose. Et parmi ces choses, il y a ce qui ne peut pas être délégué : l’empathie, la compassion…

Alptis : Il y a des écueils tout de même ?

Pierre-Marie Lledo : Oui, le numérique peut sans doute nous enfermer dans le présent… avec l’envie d’avoir tout, tout de suite. Or, ne pas pouvoir attendre et vivre dans la quête permanente du plaisir diminue le libre arbitre. Devant plusieurs options, je prendrai d’emblée celle qui m’apporte le plaisir le plus fort. À l’extrême, c’est le chemin vers les addictions. Quand on perd la mémoire (le passé) et le désir (l’avenir) au profit de l’immédiateté, on perd sa boussole, et la possibilité de trouver des satisfactions dans la vie ordinaire.

Alptis : Comment tirer le meilleur parti du numérique ?

Pierre-Marie Lledo : Un algorithme peut calculer plus vite que nous, mais il faut comprendre que la valeur ajoutée de l’humain par rapport à l’intelligence artificielle, c’est la possibilité de prendre des décisions avec une nourriture affective, avec des émotions. Le cerveau est la chambre d’écho de l’autre.

C’est pourquoi, dans la maladie d’Alzheimer, il faut mettre autant d’espoir dans le rôle des aidants et des émotions qu’ils peuvent transmettre que dans les prouesses attendues de la chimie des médicaments.